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LA PÉDAGOGIE FRANÇAISE.

du bon sens. Leur méthode se peut résumer en un mot, l’action : qu’est-ce donc que l’homme sinon un être né pour l’action ? Au lieu de plonger l’écolier dans les livres, ils le plongent, en quelque sorte, dans la vie réelle par l’exercice simultané de toutes ses facultés : nous n’apprenons pas à manier un cheval en regardant un écuyer, ni à chanter en écoutant un musicien ; Comment pourrions-nous « apprendre à bien parler et à bien juger, sans nous exercer à parler et à juger ? Or à cet apprentissage, tout ce qui se présente à nos yeux, sert de livre suffisant : la malice d’un page, la sottise d’un valet, un propos de table, ce sont autant de nouvelles matières… » À la promenade, au jeu, à table, partout cet enseignement peut trouver sa place. On le voit, nous n’avons pas inventé les leçons de choses, et si le défaut d’espace ne m’’obligeait à restreindre les limites de cet article, j’en emprunterais aisément la preuve à Fénelon et aux petites écoles de Port-Royal. C’est bien À le principe le la méthode intuitive, et de cette dialectique qui conduit l’enfant comme par degrés, du sensible au spirituel, du connu à l’inconnu, du particulier au général. Et ce n’est pas seulement une simple indication, le procédé est expressément décrit dans les Essais : « On ne cesse de criailler à nos oreilles, comme qui verserait dans un entonnoir, et nostre charge ce n’est que redire ce qu’on nous a dit. Je voudrais que le maître corrigeât cette partie, et que de belle arrivée, selon la portée de l’âme qu’il a en main, il commençât à la mettre sur la montre, lui faisant goûter les choses, les choisir et discerner d’elle-même. Quelquefois lui ouvrant le chemin, quelquefois le lui laissant ouvrir. Je ne veux pas qu’il invente et parle seul : je veux qu’il écoute son disciple parler à son tour. Socrates, et puis Arcesilaüs, faisaient premièrement parler leurs disciples et