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ÉDUCATION DE PAULINE DE GRIGNAN.

ancienne, on n’avait pas encore Rollin. Quant à Amyot, si agréable dans son vieux style, Mme de Sévigné ne semble pas l’avoir connu. Elle appréciait pourtant Comines, en qui elle trouve « un tour plaisant, beaucoup de bon sens et de justes peintures des traverses de la vie humaine » ; elle mentionne aussi Joinville ; mais elle ne jugeait pas sans doute que ces ouvrages pussent être goûtés de Pauline, assez rebelle d’ailleurs à toute lecture d’histoire sérieuse et qui disait d’elle-même plus tard : « Pour vous dire humblement la vérité, je n’ai jamais aimé l’histoire toute sèche ; mais quand elle est ornée de jolis traits, de faits un peu fabuleux, dans le goût par exemple de Quinte-Curce, oh ! alors je la lis avec grand plaisir. Je n’ai jamais pu avaler l’histoire de France, Mézeray, Varillas : voilà ma confession. Les livres de morale et les romans, c’est mon goût. » (6 février 1132.)

Les romans, nous y voilà ; ce n’est pas d’aujourd’hui, on le voit, que date cette passion, contre laquelle tant de voix graves se sont élevées, sans pouvoir en guérir la jeunesse, et quelquefois l’âge mûr. Pourquoi aussi le monde réel est-il si peu charmant ? C’est sa faute si l’on aime à s’enfuir dans le monde imaginaire des dévouements chevaleresques, des exaltations généreuses, des désintéressements héroïques, des amours nobles et purs. Tout le moyen âge, si malheureux et si troublé, fut épris de romans : Roman de la Rose, Roman du Renard, romans des Douze Pairs ; Arthur, Lancelot du Lac, la Belle Genévra, Ogier le Danois, l’Enchanteur Merlin, voilà ce qui passionnait les châteaux et les chaumières. Au XVIIe siècle après d’Urfé et ses poétiques bergers du Lignon, on eut les volumineuses compositions de La Calprenède, sa Cassandre, sa Cléopâtre, chacune en dix ou douze gros