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REVUE PÉDAGOGIQUE

tions systématiques. En ramenant l’intelligence humaine à l’observation intime, il lui montrait cette méthode de l’expérience qu’elle devait appliquer plus tard, et avec tant de bonheur, à un objet moins restreint.

Nous ne voulons pas quitter Socrate sans faire voir chez lui en action, par un exemple choisi entre mille, un admirable sens pédagogique. C’est dans la leçon de modestie qu’il donne au bel et présomptueux Euthydème. Il devine dans ce jeune homme un esprit droit et juste, mais égaré par l’orgueil, et dont la vanité cherche à se dérober à un enseignement salutaire. Il va s’asseoir auprès de lui dans une boutique de sellier « où Euthydème, trop jeune encore pour aller à l’assemblée, se rendait lorsqu’il voulait s’occuper de quelque affaire. » Il le pique, il le raille avec infiniment d’esprit et de grâce. Par un mélange habile d’ironie, de raison, de louange, il amène le jeune homme à l’écouter plus volontiers, à discuter même avec lui ; il le presse de questions, le met cent fois en contradiction avec lui-même, le rend honteux de son ignorance ; mais cesse enfin de le tourmenter, le relève dans sa propre estime, et en fait le plus fidèle des disciples[1].

Xénophon avait reçu de son maître le don du charme ; mais son esprit moins sûr n’est pas toujours exempt de romanesque et d’utopie. C’est ainsi qu’il a fait la Cyropédie et qu’il professe une admiration sans mélange pour les lois de Lycurgue. Le titre de la Cyropédie fait attendre un ouvrage sur l’éducation. Mais l’éducation véritable de Cyrus est terminée avant la fin du premier livre ; le héros perse ne reçoit plus dans la suite de ce roman historique que celle qui est donnée à tous les hommes par les évé-

  1. Entret. mém., 1. IV, chap. 2.