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LES DOCTRINES PÉDAGOGIQUES DES GRECS.

nements et la pratique de la vie. Dès le début on aperçoit la chimère, cet amour excessif de la réglementation, ce dédain secret de la liberté, cette facilité à sacrifier l’individu aux intérêts de l’État, qui est le caractère commun de presque tous les utopistes.

Xénophon nous conduit sur une place de la capitale des Perses qu’il appelle Éleuthère, par une sorte d’ironie inconsciente ; autour de cette place sont bâtis le palais du roi et les tribunaux ; elle est divisée en quatre parties, où se tiennent séparément les enfants, les adolescents, les hommes forts et les vieillards. Chacune de ces quatre classes a douze chefs : douze vieillards président à l’éducation des enfants, douze hommes forts à celle des adolescents. « Les enfants se rendent aux écoles pour apprendre la justice ; ils vous disent qu’ils vont à ce genre d’étude comme on va Chez nous s’instruire dans les lettres. Leurs gouverneurs sont occupés à juger leurs différends ; car il s’en élève entre eux comme parmi les hommes forts ; ils s’accusent de larcin, d’injures et de tous autres délits semblables. Une peine est prononcée, tant contre les coupables convaincus que contre ceux qui accusent injustement[1]. »

Voilà des écoles où on apprendra peut-être la justice, au milieu de ces procès perpétuels que Xénophon, plein des souvenirs du Pnyx, fait naître entre les enfants perses, mais où on prendra certainement des habitudes de paresse, de bavardage et de délation qui n’étaient peut-être pas tout à fait étrangères aux Athéniens. L’auteur lui-même nous avoue naïvement que Cyrus, à la cour de son grand-père Astyage, aimait d’abord trop à parler, « parce qu’en Perse il jugeait les différends de ses camarades, questionnait

  1. Cyrop., 1. I, ch. 2.