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REVUE PÉDAGOGIQUE.

même veut qu’on étudie pendant trois nouvelles années, quand on sort de l’école du grammairien[1] ?

Il est vrai qu’il place l’enseignement de la lyre sous la direction de musiciens sexagénaires, suivants de Bacchus, qui le feront servir pour le plus grand bien de la morale, et « qui devront avoir un goût parfait en tout ce qui concerne la mesure et les différentes combinaisons de l’harmonie, afin que, distinguant les mélodies qui expriment le caractère d’une âme vertueuse de celles qui expriment le caractère opposé, ils rejettent celles-ci, mettent celles-là en honneur, les chantent aux jeunes gens, les fassent entrer dans leur âme et les excitent à l’acquisition de la vertu, les mettent, en quelque sorte, sur la voie au moyen de ces imitations[2].

Il y a certainement beaucoup d’exagération dans cette importance accordée aux sons des instruments et des voix pour l’éducation de l’âme. Platon irait presque jusqu’à dire, comme un personnage de Molière[3], que tous les désordres qu’on voit dans le monde n’arrivent que pour n’apprendre pas la musique.

Cependant, il est d’observation vulgaire que la mélodie agit avec une certaine force sur les dispositions de l’âme et la déprime ou la relève, suivant qu’elle est molle, triste, gaie, vive.

Cicéron le remarque dans le-traité de l’Orateur : « Rien n’a de rapports aussi étroits avec nos âmes que les sons et les rythmes : ils nous excitent, nous adoucissent, nous portent à la langueur, à la gaieté, à la joie[4]. »

  1. Lois, p. 238.
  2. Lois, p. 241 et 242.
  3. Le Bourgeois gentilhomme, acte I, sc, 2.
  4. De Orat., l. II.