Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/244

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nière. La suppression de l’une et l’autre n’affaiblirait la conscience religieuse que si elle portait atteinte à la spiritualité de Dieu. Que tel n’est point le cas pour la personnalité, cela n’a pas besoin d’être discuté ; quant à la suppression de la forme de la conscience, ceux-là seuls peuvent prétendre qu’elle altère la spiritualité, qui nient l’existence de l’esprit inconscient et sa supériorité sur l’esprit conscient.

À la fin du chapitre, Pfleiderer parle de la trinité ; il dit à ce propos : « La vraie mesure de la valeur spécifique chrétienne d’un concept de Dieu n’est pas, comme on le prétend généralement de nos jours, dans l’admission de la personnalité, mais plutôt dans la proportion où ce concept correspond à l’idée de la trinité (à l’idée et non aux formules). » Cette mesure se conçoit dans le système de Hegel, puisque dans la pensée de Hegel elle est identique à la triplicité de sa méthode dialectique, dont le rejet était, aux yeux de ce philosophe, un crime contre le Saint-Esprit. Mais cette mesure ne se comprend pas dans le système de Pfleiderer. La trinité, telle qu’il l’explique, ne ressemble en rien à la divinité en trois personnes qui constitue le fond non seulement de la trinité chrétienne, mais encore de toutes les autres. En outre, la définition qu’il donne se meut dans des généralités tellement vagues qu’on peut trouver des rapports avec sa trinité dans toute religion examinée au point de vue philosophique. Il dit : « Dans l’essence de l’esprit infini, il y a ce triple moment : il est la base de la vie de l’esprit fini, la force infinie dans cet esprit et le but infini de sa destination ou le principe qui engendre l’opposition, la pénètre et l’élève à f unité en soi, l’unité avant, dans et au-dessus de l’opposition. » Les deux premiers moments sont exacts au point de vue philosophique, mais ils conviennent au moins aussi bien au créateur et au conservateur dans la trimourti indienne qu’au Dieu chrétien, père et fils. Le troisième moment est peu clair en lui-même et, comme nous le verrons, insoutenable ; en outre, la conciliation du triomphe sur l’opposition doit déjà être donnée dans le deuxième moment, si celui-ci ne doit pas sortir de la sphère de la divinité elle-même pour tomber dans la sphère de l’opposition non divine. Mais, quand même cette conception des trois moments du processus serait inattaquable, ils ne constitueraient cependant ni des sujets séparés, ni des qualités séparées du même sujet, ni des divisions du processus séparées dans le temps, mais seulement des côtés inséparablement unis dans chaque phase du processus, de sorte qu’ils résistent absolument à toute distinction artificielle. Cette trinité est donc inadmissible à tout égard ; la véritable trinité n’est rien autre que la dislocation du théisme sémitique par la conscience