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ANALYSESalaux. — De la Métaphysique.

« l’acte, qui produit des modes, qui est cause efficiente et cause finale ; » nous revenons au spiritualisme classique. Malheureusement, à la page 151, l’auteur s’exprime en vrai panthéiste ; il nous dit que les effets « sont dans la cause, les modes dans la substance ; que la cause est aussi dans ses effets, la substance dans ses modes. » Comment ce qui produit serait-il dans ce qu’il va produire ; ce qui est, dans ce qui n’est pas encore ?

Autre difficulté : le présent chapitre se termine par l’énoncé d’une théorie bien connue, celle qu’un profond philosophe contemporain appelle justement « l’empirisme de la raison pure. »

M. Alaux attribue à l’âme la perception de l’infini : à ses yeux, la raison est un sens suprasensible qui nous fait entrevoir Dieu. Mais comment affirmer cela quand on a soutenu, quand on soutient en même temps, que la raison est la faculté de concevoir des rapports ? Il faut reconnaître qu’à la page 179 M. Alaux s’est aperçu de la difficulté : « Cette idée de l’infini en acte, du parfait, n’est pas une idée de raison, puisqu’elle n’est pas une idée de rapport, mais d’être. Elle est donc une perception, qui résulte d’une application de la raison à un sentiment qu’un sens de l’âme nous donne. Il y a des sens de l’âme autres que les sens externes, autres que les sens internes. » Voilà qui est net cette fois ; mais je demande encore comment les idées de raison, qui ne sont que des idées de rapports, aboutissent ou se déterminent les unes les autres à l’idée de l’infini, qui est une idée d’être.

Valeur objective des idées de raison. — Ce chapitre est très court. J’ajoute qu’il ne répond pas à son titre. Il nous y est parlé de M. Spencer, des antinomies de Kant. On pressent une discussion ; mais, au moment où l’on s’y attend le moins, la pensée tourne court et conclut brusquement et brutalement par une fin de non-recevoir.

Quelques essais de métaphysique. — Il y avait deux manières de procéder. Ou faire à grands traits l’histoire des variations de la pensée philosophique, exprimer le suc de chaque doctrine, marquer la place de chaque philosophe. Ainsi a fait Charles Secrétan, dans son admirable premier volume de la Philosophie de la liberté : c’est un voyage à vol d’oiseau, disons mieux à vol d’aigle, à travers les systèmes. Chaque grand nom y est cité, chaque doctrine résumée, formulée, magistralement appréciée. — Ou classer les différents systèmes, en extraire les formules, en juger la valeur comparative : c’est le parti auquel s’est arrêté M. Liard, l’heureux concurrent de M. Alaux. — M. Alaux a pris un troisième parti : c’est d’entreprendre une course au galop à travers les doctrines métaphysiques, en partant d’Aristote, en ne s’arrêtant en face d’aucun des grands maîtres, de ne citer ni Descartes, ni Malebranche, ni Leibniz, ni Kant. Quatre philosophes, seuls, reçoivent les honneurs d’une mention, tous quatre contemporains. On fait donc quatre stations : l’une à la tombe de Bordas-Demoulin, un grand penseur méconnu ; la deuxième à la tombe de Victor Cousin, le patriarche « de