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delbœuf. — le sommeil et les rêves

davantage sur le côté physiologique de la question, et emploie un grand nombre de pages à faire ressortir l’importance des rêves pour la psychologie des différents peuples.

Ce livre, dédié au professeur Wundt, est intéressant, plein de faits, écrit avec méthode et clarté, facile à lire ; mais il n’est pas exempt non plus de hors-d’œuvre.

Il comprend dix chapitres. Le premier s’occupe de l’influence du sommeil et des rêves tant sur les individus que sur les nations. On y trouve rassemblées les diverses opinions que les anciens et les modernes ont émises sur les songes. « Ils constituent un facteur capital dans la croyance en l’immortalité de l’âme », et leur rôle dans l’histoire politique est loin d’être à dédaigner : il suffit de citer les oracles de Delphes, les visions d’un Mahomet, les hallucinations d’une Jeanne d’Arc.

Dans le chapitre suivant, M. Radestock rapporte les définitions nombreuses que les poètes et les philosophes de tous les siècles ont données des songes ; puis, exposant ses vues sur la nature de l’union de l’âme et du corps « qui ne sont que deux différents aspects d’un seul et même être », il en conclut la nécessité, dans l’étude du sommeil et des rêves, de ne pas s’attacher exclusivement aux phénomènes psychiques en négligeant les phénomènes corporels.

Le troisième chapitre est consacré à la faculté reproductrice « normale et anormale ». Tout change dans la nature, l’âme aussi bien que le corps. Mais le passé se trouve relié au présent par la mémoire. La reproduction peut prendre deux formes : selon que l’image renouvelée est moins vive ou aussi vive que l’image originelle, il y a souvenir ou hallucination (illusion). La reproduction a sa racine dans l’association des idées, dont les lois sont bien connues : loi de la ressemblance, du contraste, de la coexistence et de la succession. M. Radestock, suivant en cela l’exemple de la plupart des psychologistes, ne s’enquiert pas du principe dernier de ces lois. Les idées ne font pas que se succéder l’une à l’autre, parfois elles se lient entre elles et s’agglutinent, de même que les sensations s’entrelacent. C’est ainsi que l’image de la cognée, rappelant celles de bois et de charpentier, et s’unissant avec elles, fournit l’image composée d’un homme occupé à fendre du bois. La différence entre le souvenir et l’hallucination dépend de la force de l’excitation ; entre l’un et l’autre il y a tous les passages imaginables. L’hallucination est une reproduction qui a un éclat comparable à celui de la réalité. Le principal facteur de l’illusion est donc nécessairement l’exaltation de l’excitabilité du système nerveux central.

Je note, en passant, que cette explication n’en est pas une : c’est