Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, VIII.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quarante-cinq, etc., nous avons directement conscience d’un travail d’articulation. Les articulations sept et six sont immédiatement suivies de cette autre articulation treize. »

II

Nous venons de montrer que le mouvement entre dans la plupart de nos états de conscience comme élément constitutif ; que les perceptions, les images et les idées le supposent ; que, s’il était supprimé, ces états disparaîtraient ou du moins prendraient une autre forme que notre conscience actuelle ne nous permet pas d’imaginer. Il nous resterait à examiner le rôle des mouvements dans les sentiments et les volitions. En vue d’une recherche complète, il y aurait à déterminer tout d’abord — ce qui n’a pas été fait jusqu’ici, croyons-nous — si, indépendamment des mouvements qui les expriment et les traduisent, les divers groupes de sentiments impliquent des éléments moteurs, à titre de parties intégrantes, comme le font les sensations et les images. Nous ne l’essayerons pas dans cette courte étude, et même, en ce qui concerne les mouvements comme résultant de certains états de conscience, nous ne voulons indiquer que quelques points.

De tout temps, on a noté la relation intime qui unit les sentiments et les volitions aux mouvements. Toutefois, l’ancienne psychologie, par suite de ses habitudes et de sa méthode, a toujours eu une tendance à considérer les phénomènes moteurs comme un acte extérieur, comme un résultat, une conséquence, mais d’une nature étrangère. Dès que le mouvement commence, la tâche du psychologue finit. C’est une étude qu’il passe à d’autres, qui relève de la physiologie, et, lorsqu’il l’a signalée en général comme un cas d’influence de l’« âme » sur le corps, il croit n’avoir plus à s’en occuper. L’ancienne psychologie se contente de dire « que dans certains cas l’idée ou le sentiment produit un mouvement », formule qui est suffisante pour la langue courante, mais qui dans un traité scientifique est inexacte et cache une fausse conception. Ce serait en effet chose merveilleuse, comme le dit justement Hughlings Jackson, que ce changement total et soudain de fonction. Une idée telle que les spiritualistes la définissent, produisant subitement un jeu de muscles, ne serait guère moins qu’un miracle.

Au contraire, si au lieu de considérer les faits psychiques à cet état d’abstraction, dissociés de leurs antécédents et de leurs conséquents, on les considère sous leur forme concrète, c’est-à-dire dans leur