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ANALYSESlewes. — The study of psychology.

physique, les maladies mentales passèrent des mains des physiciens à celles des prêtres : l’exorcisme, les prières tinrent lieu d’hygiène et de prescriptions techniques, la démence étant, selon les théologiens une possession démoniaque, selon les métaphysiciens une perturbation d’ordre spirituel, un défaut d’harmonie entre l’âme et son instrument. Aujourd’hui, les maladies mentales ont pris rang à côté des maladies corporelles ; elles sont devenues objet de science naturelle, et on les étudie selon la méthode employée par toutes les autres sciences, en ce sens que l’observation des symptômes sert de guide à la recherche des causes. Toute fonction anomale est rapportée à un état anomal de l’organisme. « Si le changement de point de vue qui a fait étudier les maladies mentales comme symptômes de maladies organiques est justifié par les succès de la thérapeutique moderne ; s’il est vrai (et quel homme compétent en pourrait douter ?) que l’intelligence des maladies mentales exige cette association des interprétations physiologiques et des observations cliniques, il est évident que c’est seulement en suivant une méthode semblable que nous pouvons arriver à une explication des actions psychiques normales »

IV. Les facultés supérieures de l’esprit et l’organisme. — Un obstacle insurmontable, semble-t-il, s’oppose aux progrès de cette psychologie biologique. On suppose en effet que toutes les fonctions de l’esprit correspondent toujours à des états organiques. Or cette hypothèse a contre elle deux faits. D’abord, bien qu’il y ait un abîme entre l’homme et les animaux supérieurs, l’anatomie comparée ne découvre que des différences insignifiantes entre le cerveau humain et le cerveau des singes anthropomorphes ; ce qui semble donner gain de cause à la doctrine de la séparation du moral et du physique. Ensuite les localisations cérébrales, en dépit de quelques découvertes, ne pourront vraisemblablement jamais indiquer le siège de la raison, de la conscience, de l’entendement ; de sorte que tout l’effort de la psychologie nouvelle aboutit à un aveu d’impuissance. Les hautes facultés, s’écrie-t-on, demeurent inaccessibles au physiologiste ; il y a une « terre inconnue » où il n’abordera jamais.

L’expérience a heureusement résolu l’objection. Comparez deux individus tirés de milieux très différents : un génie tel que Gœthe, et un être d’ordre inférieur, un Caraïbe. Certes il y a un intervalle immense de l’une de ces intelligences à l’autre ; et cependant leur contraste s’explique par l’hérédité, les conditions de milieu et l’éducation. Il n’y a entre ces deux individus qu’une différence de degré dans le développement de leurs facultés, les fonctions de l’espèce étant identiques chez tous les deux. Descendons plus bas encore, jusqu’au dernier échelon de l’humanité : que reste-t-il comme caractères constitutifs de l’espèce ? Quelques aptitudes essentielles très réduites. Par exemple, chez tous les individus de l’espèce humaine, la main est un organe de préhension ; voir est de même la fonction d’un certain appareil. Ce sont là les fonctions simples. L’observation nous oblige d’ailleurs de reconnaître