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fortifier sa foi et de la répandre. Pour que la morale relève parmi nous son front humilié, il faut qu’on ait la preuve que les âmes échappent à la dissolution des corps, qu’elles sont libres après comme avant la mort et défient le déterminisme des phénomènes naturels. Les apparitions et les manifestations spirites de toute sorte doivent précisément montrer aux incrédules et aux savants qu’il existe d’autres forces que celles qu’ils ont accoutumé de mesurer et de calculer. Pour Ulrici, c’est à un décret de la divine Providence qu’on doit ces mystérieuses révélations contemporaines des esprits frappeurs, que Wundt a eu le tort de comparer aux esprits des chamans, des sorciers et des prestidigitateurs. Dans cette brochure comme dans l’article de la Zeitschrift, il répète que la Providence a voulu porter un coup terrible au matérialisme scientifique de notre temps, qui, appuyé sur la conception mécanique du monde, ne recule plus devant aucune extrémité et nie audacieusement toutes ces croyances, l’immortalité, le libre arbitre, les causes finales, etc., sans lesquelles l’humanité ne saurait vivre.

Cette réponse d’Ulrici a produit sur Wundt l’effet qu’on imagine ; nous croyons savoir que le physiologiste ne répondra plus au philosophe.

Jules Soury.

Lange. Histoire du matérialisme et critique de son importance a notre époque, trad. par B. Pommerol, avec une introduction par D. Nolen. Tome II. Paris, Reinwald.

Il a été si souvent question dans cette Revue de Lange, de ses travaux historiques et de ses conceptions philosophiques, que nous ne pourrions revenir sur ce sujet sans tomber dans des redites[1]. Aussi nous bornerons-nous à indiquer sommairement au lecteur le contenu de ce dernier volume. Il commence à Kant et embrasse toute la période contemporaine (jusqu’en 1874)[2]. Il est, par conséquent, consacré presque tout entier à des auteurs et à des doctrines que nous entendons discuter chaque jour. Une critique préliminaire peut être adressée à ce deuxième volume, c’est qu’il est en disproportion énorme avec le premier. L’auteur consacre 692 pages à une période de 75 ans, tandis que le premier volume : qui, de Démocrite à Lamettrie, parcourt 23 siècles, ne contient que 538 pages. Cette disproportion est d’autant plus choquante que, de l’aveu même de l’auteur, les théories matérialistes sont loin d’avoir gagné du terrain, à notre époque. On rencontre peu de ces doctrines complètes, systématiques, sûres d’elles-mêmes, qui ne sont pas rares dans les siècles passés. Mais Lange est tombé dans un défaut presque inévitable à l’histoire contemporaine. Par l’effet des polémiques courantes au milieu desquelles nous vivons, certaines questions de détail

  1. Voir les articles publiés dans la Revue philosophique, numéros de mai, novembre et décembre 1876 ; octobre et décembre 1877 ; juillet 1878.
  2. La préface de ce volume est datée de la fin de janvier 1875, et l’auteur est mort quelques mois après.