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loi physiologique bien connue. Le pouvoir excito-moteur des centres réflexes augmente, quand leur connexion avec les centres supérieurs est rompue[1]. — Restreignons-nous au problème psychologique : il est possible d’y répondre. Si l’on s’obstine à faire de la conscience une « force » existant et agissant par elle-même, tout devient obscur. Mais si l’on admet, comme nous l’avons dit dans le précédent article, que la conscience est l’accompagnement d’un état nerveux, lequel reste l’élément fondamental, tout devient clair. Il n’y a du moins aucune contradiction à admettre qu’un état nerveux suffisant pour déterminer certains actes soit insuffisant pour éveiller la conscience. La production d’un mouvement et celle d’un état de conscience sont deux faits distincts et indépendants : les conditions d’existence de l’un ne sont pas nécessairement celles de l’autre.

Remarquons pour terminer que la conséquence fatale des accès épileptiques répétés, surtout sous la forme de vertige, est l’affaiblissement progressif de la mémoire dans sa totalité. Cette forme d’amnésie sera étudiée plus loin.

Nous passons maintenant à des cas d’amnésie temporaire d’un caractère destructeur. Dans les exemples précipités, le capital accumulé jusqu’au moment de la maladie n’est pas entamé : il arrive seulement que quelque chose qui a été dans la conscience ne reste pas dans la mémoire. Dans les cas qui vont suivre, une partie du capital est perdu. Ces cas sont les plus frappants pour l’imagination. Il est possible qu’un jour, avec les progrès de la physiologie et de la psychologie, ils nous en apprennent beaucoup sur la nature de la mémoire. Pour le moment, ils ne sont pas les plus instructifs, à mes yeux du moins et sans vouloir rien préjuger sur ce qu’ils révéleront aux autres.

Ces cas diffèrent beaucoup entre eux. Tantôt la suspension de la mémoire part du début de la maladie pour s’étendre en avant, tantôt elle recule un peu sur les derniers événements passés ; le plus souvent, elle s’étend dans les deux sens, en avant et en arrière. Quelquefois la mémoire revient d’elle-même, brusquement, quelquefois lentement et avec un peu d’aide ; quelquefois la perte est absolue, il faut procéder à une rééducation complète. Nous allons donner des exemples de tous ces cas.

« Une jeune femme, mariée à un homme qu’elle aimait passion-

  1. « Un caractère très important de la manie épileptique, dit Falret, loc. cit., c’est la ressemblance absolue de tous les accès chez le même malade, non seulement dans leur ensemble, mais encore dans chacun de leurs détails… Le même malade exprime les mêmes idées, profère les mêmes paroles, se livre aux mêmes actes. Il y a une surprenante uniformité dans tous les accès. »