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bénard. — la théorie du comique.

parallèle qu’il établit entre la tragédie et la comédie, il donne à cette dernière la préférence au point de vue de la valeur esthétique et des difficultés que doit vaincre le poète comique. Il ne songe pas à traiter la question dans sa généralité. Les auteurs de traités d’esthétique, comme Heydenrick, Bouterweck, etc., n’offrent rien qui mérite d’être signalé et puisse nous intéresser, sauf des observations de détail où l’on trouve le reflet des théories contemporaines.


III


La théorie du comique, qu’on a vue reléguée jusqu’ici dans l’un des compartiments les plus obscurs et les plus étroits de la science du beau, cette théorie qui a si peu occupé l’attention des penseurs et des esthéticiens philosophes, va tout à coup entrer dans une phase nouvelle, prendre des proportions et une importance que sa destinée antérieure était loin de faire prévoir. Comment s’est opérée cette transformation ? Par quel coup de baguette magique a pu s’accomplir cette subite métamorphose ? Ce changement est dû à une double cause : 1o à l’influence d’un système philosophique qui semble n’avoir aucun rapport direct avec elle, mais dont elle est, dans la région de l’art, le corollaire inévitable ; 2o à la révolution qui s’est opérée dans le monde artistique et littéraire et qui n’est autre que l’avènement du romantisme.

La question que nous étudions se trouve en effet mêlée aux débats suscités par cette école et par ce système. Nous en dirons quelques mots avant de poursuivre notre marche et de nous livrer à un nouvel examen.

1o Nous ne nous arrêterons pas à établir la filiation qui existe entre ce qui a été appelé le système de l’ironie dans l’art et la philosophie de Fichte, dont le caractère est le subjectivisme absolu. Hegel l’a démontrée d’une manière supérieure dans son Esthétique (Introd.). La négation du monde réel, le triomphe absolu du moi qui se joue de ses propres créations, qui règne en maître sur les ruines de l’univers physique et moral, amenait naturellement dans l’art cette forme du beau qui est l’ironie divine et que nous allons voir se définir sous le nom d’humour et de génie humoristique. 2o D’autre part, on sait que le romantisme a non seulement réhabilité le laid sous toutes ses formes, le hideux, l’ignoble, l’horrible, etc., mais qu’il donne aussi une place non moins grande au comique, depuis le