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analyses. — wigand. Der Darwinismus.

tination physiologique de l’individu ; la preuve, c’est que des êtres d’espèce différente vivent fort bien à côté les uns des autres dans les mêmes conditions de milieu externe. Et précisément ces caractères, qui fixent les divisions principales du règne animal et du règne végétal, qui d’après Darwin sont relativement les plus anciens et conséquemment sont soumis depuis aussi longtemps que possible à l’influence de la sélection naturelle, ces caractères, dis-je, ne sont pas le moins du monde subordonnés à la fonction des organes. Partant ils ne pouvaient en aucune façon donner prise à la sélection. »

Impossible aussi, la transmutation des formes organiques. « Deux espèces animales ou végétales se distinguent l’une de l’autre par une infinité de marques ; elles sont spécifiquement différenciées sous tous les rapports, au point de vue de la forme extérieure, de leur structure élémentaire, de leur composition chimique, de leurs relations biologiques et physiologiques. Au contraire, deux variétés ne diffèrent que par quelques points. Conséquence : deux espèces issues de variétés préexistantes par simple développement suivant une même direction ne devraient aussi différer l’une de l’autre, malgré toutes les différences quantitatives, que sous un seul aspect. » De là suit que, pour expliquer les nombreuses divergences qui existent en fait, il faudrait admettre une infinité de processus particuliers, simultanés ou successifs. Et encore il ne sortirait de là qu’une mosaïque de formes et non un tout harmonieux.

On a beau accumuler les artifices mécaniques. « Il est impossible de tirer un Apollon d’une statue de satyre, une église gothique d’une caserne, qu’on accumule toutes les modifications qu’on voudra, qu’on multiplie à plaisir les additions et les reconstructions ; la chose n’est possible qu’à la condition de tout refaire de fond en comble, si bien qu’il ne reste pas pierre sur pierre des fondements primitifs. Il est tout aussi inconcevable qu’on puisse à l’aide de simples variations successives transformer l’âne en cheval, le pommier en poirier, et généralement tel type d’un genre, d’une famille ou d’une classe en un autre type de même catégorie, comme le hêtre en chêne ou en tilleul, l’âne en bœuf ou en lion, le singe en homme, le ver ou le mollusque en poisson, le poisson en reptile. C’est qu’en effet chacun de ces types, chaque espèce même considérée au point de vue de sa direction évolutive propre est constituée suivant son plan spécial, profondément unitaire ; jusque dans ses tissus les plus minces, jusque dans ses lignes les plus délicates, l’espèce en garde l’empreinte, parce que la différence de deux types n’est pas simplement graduelle, locale et superficielle, mais bien antithétique, universelle et fondamentale, pénétrant l’organisation tout entière, parce que les diverses marques distinctives d’un type sont solidairement reliées et enchainées entre elles. »

Cette difficulté, si énergiquement rendue par Wigand, a conduit les darwiniens à envisager les types analogues actuellement existants comme les descendants d’une forme radicale commune. On sauvait du