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1re objection. — Les phénomènes du somnambulisme sont incompatibles avec les données de la science. Il est impossible d’admettre que des passes produisent le sommeil, qu’un fluide s’échappe du corps à la volonté du magnétiseur, que la pensée se transmette sans une manifestation extérieure, que la vision se fasse par l’épigastre, l’audition par la paume des mains et la perception des saveurs par le front.

Il y a là une confusion qu’il est nécessaire de faire disparaître. Le somnambulisme, cette névrose dont les causes et la nature sont encore si mystérieuses, n’a rien à faire avec les explications que tentent d’en donner les charlatans. Il ne s’agit pas de réfuter leurs divagations plus ou moins intéressées, mais d’étudier et de contrôler ce qui a été vu par des savants sérieux, dignes de respect. Tous ceux qui, au lieu de s’appliquer à prouver que les somnambules n’ont jamais réalisé de miracles, ont cherché à voir par eux-mêmes les phénomènes physiologiques, tous ceux-là ont été convaincus bientôt que, par l’influence des passes ou de la fixation du regard, il se produit une névrose spéciale avec des caractères bien déterminés. Il est facile de nier telle ou telle histoire grotesque ? Mais que prouvera-ton, sinon qu’il y a des dupes et des fripons mêlés à ce problème de physiologie pathologique ? Il semble même, à voir tant d’erreurs si répandues, que nombre de vérités doivent s’y trouver mêlées. Si tout était fantasmagorie et simulation, non seulement le magnétisme n’aurait pu s’établir, mais il ne se serait pas propagé, et aurait disparu sans laisser de traces. L’erreur ne peut triompher qu’à la faveur des vérités qui s’y mêlent.

D’ailleurs, nous n’avons pas, sur la nature et les fonctions du système nerveux, des notions tellement parfaites et précises que nous puissions nier la possibilité de tel ou tel phénomène. La méthode expérimentale doit toujours nous servir de guide, et les négations à priori doivent, aussi bien que les affirmations à priori, être bannies des discussions scientifiques. À vrai dire, en matière de somnambulisme, les négations ont toujours été à priori. Je ne crois pas qu’un expérimentateur, appuyé sur un nombre quelconque de faits, ait conclu à la non-existence du somnambulisme. On s’est appuyé, pour nier, sur des raisonnements et non sur des expériences. Personne encore, que je sache, n’est venu dire : « J’ai essayé d’endormir quatre personnes à différentes reprises, en employant les procédés habituels, et je n’ai rien obtenu ». Jusqu’ici, l’on s’est contenté de sourire et de dire : « C’est impossible ». La réfutation me paraît insuffisante.

2e objection. — Tout ce qu’on observe est inconstant, irrégulier,