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sont appliquées à l’exécution aussi rapide et complète que possible de l’ordre qui lui a été donné.

Il y a d’ailleurs de très grandes différences entre les divers sujets, et il est assez difficile de formuler de règle générale. Toutefois en général les choses se passent ainsi. Plus le sommeil a été souvent provoqué, mieux on peut observer cette adaptation de toute l’intelligence et de toute la sensibilité aux idées suggérées. Comme pour le sommeil chloroformique, comme pour l’ivresse, tous les sujets ont leur manière propre de réagir. La réceptivité est différente, et je n’ai jamais rencontré deux somnambules qui soient absolument semblables. Ce qu’il y a d’intéressant, c’est que chez la même personne le sommeil magnétique est toujours identique avec lui-même ; mais plus la personne a été endormie souvent, plus les phénomènes sont nets, plus le sommeil est profond : c’est alors qu’on peut faire des études psychologiques fructueuses, car la plupart du temps les premiers résultats sont confus et troublés par des divagations désespérantes.

J’ai souvent cherché à vérifier ce fait, annoncé par plusieurs auteurs, que pendant le sommeil magnétique il y avait de l’hyperesthésie sensorielle, de sorte que pendant cet état les excitations, trop faibles pour être perçues à l’état normal, sont nettement perçues. A vrai dire, je n’ai rien obtenu de bien décisif. Ainsi en parlant à voix très basse, à une certaine distance, je n’ai jamais pu me faire entendre par la personne endormie mieux que si elle avait été éveillée. À Beaujon, j’endormais N… le soir, vers six heures. Je lui recommandais de rester endormie avec un bras au-dessus de la tête et en tenant un objet dans la main. Je faisais cela quand je devais passer la nuit dans l’hôpital, et cinq ou six fois dans le courant de la soirée je revenais, à pas de loup et sans apporter de lumière. Quelles que fussent mes précautions, la malade m’entendait venir. Je la retrouvais toujours dans la même position, le bras au-dessus de la tête et l’objet dans la main. Cette expérience est intéressante, d’abord au point de vue de l’impossibilité presque absolue de la simulation, et ensuite parce qu’elle témoigne d’une certaine acuité peu normale des sens. J’ai reproduit nombre de fois, sur le même sujet, cette, expérience intéressante, et un de mes collègues dans l’hôpital, l’ayant répétée à son tour, a obtenu un résultat identique.

Chez un de mes amis, le Dr L***, les passes magnétiques produisent une singulière hyperthésie. Il n’a jamais pu être endormi. Les yeux sont restés ouverts, la mémoire et la conscience demeurent intactes, mais sa sensibilité est excitée à un tel point que le plus léger attouchement de la peau lui produit une véritable douleur. Alors il saute