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h. marion. — le nouveau programme de philosophie

serait en quelque sorte les convier à une manière plus virile, à la seule vraie manière de philosopher, puisque ce serait leur donner avant tout l’esprit d’exactitude et la vigueur critique, et leur apprendre à discerner en toutes choses ce qui est prouvé et ce qui ne l’est pas. Par là, on s’obligerait pour ainsi dire soi-même à plus de rigueur dans toute la suite du cours. C’est pour ces raisons, et d’autres de même ordre, que, depuis longtemps déjà, certains professeurs n’hésitaient pas, quand ils se sentaient en présence d’une bonne classe, à mettre en premier lieu la logique, approuvés en cela par les meilleurs juges. Un tel changement d’ailleurs peut se faire d’une année à l’autre, ne fût-ce que pour introduire un peu de variété dans le cours, chose utile surtout quand il y a dans la classe des vétérans. Le mieux sera donc, en somme, de s’inspirer des circonstances, en ayant soin seulement d’expliquer et de motiver toujours ce que l’on fait, et de montrer soi-même aux élèves qu’il n’y a rien d’absolu sur ce point.

La Métaphysique et la Théodicée ont été mises ensemble, comme traitant l’une et l’autre des questions dernières ; elles sont entre elles dans le rapport du tout à la partie. Il a paru être d’une bonne méthode non seulement de les placer l’une et l’autre à la fin du cours (dont elles ne peuvent être que le point d’arrivée et non le point de départ, dans une philosophie qui cherche à se constituer comme science), mais encore et surtout d’y renvoyer avec autant de rigueur que possible toutes les questions qui sont réellement d’ordre métaphysique, bien que mêlées d’ordinaire aux autres parties de la philosophie. Toutes les questions sont ou deviennent, dès qu’on va au fond des choses, des questions de métaphysique ; la métaphysique est en un sens la philosophie même : on aboutit à elle de toutes parts. Mais ce n’est pas une raison pour la mêler d’abord à tout. Elle-même gagnera sans aucun doute à ce qu’on procède par ordre, à ce qu’on ne l’aborde que muni d’une solide connaissance des faits. Si l’absolu n’échappe pas entièrement à nos prises, si, non susceptible d’une connaissance adéquate, qui serait contradictoire à sa nature même, il peut être néanmoins entrevu et comme pressenti, à coup sûr c’est plutôt après une étude attentive des données de la conscience et des lois de la pensée qu’au mépris de toute expérience.

Mais c’est surtout à la Psychologie et à la Logique que doit profiter cette « division du travail ». Elles n’ont pas d’autre moyen de devenir des sciences positives. Quelle science se serait jamais constituée comme telle, si elle n’avait commencé par écarter de son chemin, par ajourner au moins, les questions relatives à la nature ultime, aux