Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, X.djvu/470

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
460
revue philosophique

d’intelligence ; nous avons en même temps le droit d’affirmer qu’une fois ces sociétés produites, la brutalité du caractère des unités sociales, condition nécessaire de cette opération, disparaîtra. Tandis que les profits réalisés durant la période de déprédation demeurent comme un héritage permanent, les maux sociaux et individuels causés dans cette période décroîtront et s’effaceront graduellement.

Ainsi donc, quand nous considérons la structure et les fonctions d’une société au point de vue de l’évolution, nous pouvons conserver le calme d’esprit nécessaire pour en donner une interprétation scientifique, sans perdre la faculté d’éprouver le sentiment d’approbation ou de réprobation morales.

Aces remarques préliminaires sur l’attitude mentale qu’on doit conserver dans l’étude des institutions politiques, nous en devons ajouter d’autres plus courtes relatives aux questions dont on doit s’occuper. Si les sociétés étaient toutes de la même espèce, ne différant que par le degré de croissance et de structure, on apercevrait clairement en les comparant le cours de l’évolution ; mais la différence de types qui les sépare, tantôt grande, tantôt petite, jette de l’obscurité sur le résultat de ces comparaisons.

Ajoutons encore que, si chaque société grandissait et se développait à l’abri de l’intrusion de facteurs nouveaux, l’interprétation de son évolution serait relativement facile, mais les opérations compliquées du développement social sont souvent recompliquées par des changements subits dans les systèmes de facteurs. Tantôt le volume de l’agrégat social augmente ou diminue tout d’un coup par une annexion ou par une perte de territoire ; tantôt le caractère moyen de ses unités se trouve changé par l’introduction d’une autre race à titre de conquérants ou d’esclaves ; tandis que, nouvel effet de ce changement, de nouvelles relations sociales se superposent aux anciennes. Dans bien des cas, les invasions que les peuples se font subir les uns aux autres, les mélanges de races et d’institutions, les dissolutions et les reconstructions de l’agrégat détruisent la continuité des changements normaux au point qu’il est extrêmement difficile, sinon impossible, d’en rien conclure.

Encore une fois, les changements dans le mode moyen d’existence d’une société, tantôt de plus en plus belliqueuse et tantôt de plus en plus industrielle, provoquent des métamorphoses : le changement de fonction engendre le changement de structure. Aussi faut-il distinguer les réarrangements progressifs qui appartiennent aux périodes les plus avancées du développement d’un type social de celles qui sont causées par le début du développement d’un type social autre. Les traits d’une organisation, appropriés à un mode d’activité périmé ou