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ANALYSES.piderit. La Mimique et la Physiognomonie.

Th. Piderit. La Mimique et la Physiognomonie. Traduit de l’allemand sur la deuxième édition par A. Girot, 280 pp. in-8o, Paris, F. Alcan.

L’ouvrage de M. Th. Piderit sur la mimique et la physiognomonie est sans contredit un des plus scientifiques et des plus méthodiques que nous ayons sur cette matière. On sait que le sujet ne jouit pas d’un bon renom parmi les savants et que trop souvent les fantaisies personnelles s’y sont donné carrière. L’auteur a la prétention, presque toujours justifiée, de faire œuvre de savant et d’écarter les vues divinatoires et le ton d’oracle de Lavater. Il ne procède pas par intuition et par affirmations dogmatiques : il constate, il explique, il déduit. Cette simple division de son sujet en deux parties, mimique et physiognomonie, est un trait de lumière : c’est la mimique en effet qui explique la physiognomonie qui n’est qu’une mimique fixée et permanente. La mimique consiste à déterminer comment et pourquoi certains muscles se contractent à la suite de certaines émotions de l’âme ; la physiognomonie s’efforce de montrer comment ces traits passagers deviennent persistants par la répétition et permettent de juger du dedans par le dehors, des dispositions de l’esprit par les traits du visage. C’est une sorte de psychologie extérieure et de physiologie de l’esprit.

On comprend aisément qu’un pareil livre ne s’analyse pas : les brèves analyses de l’auteur ne sauraient être résumées et d’ailleurs elles ont besoin des figures qui accompagnent le texte pour être parfaitement intelligibles. Qu’on en juge par ce résumé donné par l’auteur lui-même des mouvements mimiques qui se rapportent au regard. « Le regard paresseux marque l’épuisement corporel et la paresse de l’esprit ; le regard vif, l’agitation ; le regard plus ou moins ferme, différents degrés d’attention soutenue ; le regard doux, de l’intérêt sans passion ; le regard errant, de la distraction ; le regard inquiet, de l’angoisse. Le regard caché laisse voir de la défiance ; le regard pédant, de la réserve ; le regard ravi, de l’exaltation » (p. 59). Il est clair que ces épithètes pourraient aisément être taxées de banalité : il faut lire les descriptions de l’auteur et, même après les avoir lues, on ne distinguera pas toujours aisément ces différentes sortes de regard : il ne faut pas chercher dans un sujet ondoyant et divers les caractères spécifiques précis qu’une rigoureuse logique exigerait pour une bonne définition. On trouvera par exemple des observations neuves et intéressantes dans l’étude que fait l’auteur des rides verticales et horizontales qui accompagnent et pour ainsi dire soulignent le regard. Les rides verticales sont généralement l’expression mimique de la mauvaise humeur et sont causées : 1o par des souffrances ; 2o par la colère ; 3o par une réflexion pénible. Les rides horizontales sont la caractéristique physiognomonique : 1o des hommes qui s’étonnent volontiers, des curieux, des fureteurs ; 2o des hommes qui ont coutume de fixer fortement leur attention, des philosophes, des savants et aussi des hommes bornés dont la lourde intelligence est obligée à chaque instant de faire appel à toutes ses faibles ressources. Notons que l’auteur attribue beaucoup plus d’importance à