Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXVIII, 1889.djvu/181

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
171
la douleur chez les hystériques

sion sur sa main droite, pendant que celle-ci lui est cachée par un écran, et en même temps promenons sur la peau de sa main gauche sensible un pinceau à aquarelle ; ce contact si léger provoque immédiatement une douleur extrêmement vive ; et l’augmentation de la pression qu’on exerce sur la main droite peut provoquer une hyperalgésie extraordinaire dans le bras sensible. J’ai fait cette observation tout à fait par hasard. Les choses se passent de la même façon chez P… S…, qui est également hémianesthésique droite. Lavr… est à peu près anesthésique totale, mais elle présente à la main gauche de petites plaques sensibles produites par le contact de ses bagues et bracelets en or ; si on fait une légère piqûre sur ces ilots de sensibilité, en même temps qu’on presse sur les régions anesthésiques environnantes il se produit aussitôt une douleur vive, comme chez Dem… et P… S…

Cette première expérience ressemble beaucoup à l’une de celles où M. Richet appliquait un des pôles d’un courant électrique à la moitié sensible du corps et l’autre sur la moitié anesthésique ; nous ne faisons ici que remplacer le courant électrique par une excitation purement tactile, et l’on voit que le résultat est absolument le même ; une seconde ressemblance très frappante entre les deux espèces d’expérience, c’est que, dans les deux cas, on ne se sert que d’excitations très modérées.

Ajoutons que si nous répétons chez les deux sujets précédents l’expérience même de M. Richet, c’est-à-dire l’application de deux électrodes sur les deux moitiés du corps, nous obtenons rigoureusement le même résultat que lui.

En second lieu, on peut provoquer la même réaction douloureuse, en portant les deux excitations simultanément sur une région anesthésique, à la condition toutefois que les excitations aient une forme différente, par exemple en associant une pression et une piqûre.

Chez quelques sujets, un courant faradique très intense et très douloureux ne produit aucune sensation dans la région anesthésique, mais si, pendant que le courant passe, on exerce une légère pression avec le doigt, ou si on pince la peau dans la même région, le phénomène douloureux se produit instantanément.

C’est ce que nous observons par exemple chez Lavr… ; elle ne perçoit pas le courant électrique dans la région anesthésique, quand l’écartement des deux bobines de l’appareil à chariot est au minimum et l’intensité du courant induit est au maximum ; elle éprouve au contraire une vive douleur, quand le courant est beaucoup moins intense, et qu’en même temps on fait une légère piqûre à la peau.

Est-il besoin d’ajouter que ces réactions ne s’observent pas indifféremment chez tous les sujets, que chez quelques-uns on peut reproduire toutes les expériences, tandis que chez d’autres aucune ne donne de résultats ?

Je crois devoir souligner ce fait que la sensation produite n’est point une sensation du toucher, mais une sensation douloureuse ; lorsque l’excitation est faite en partie sur une région sensible, il doit se pro-