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CATÉGORIES LOGIQUES ET INSTITUTIONS SOCIALES

(Suite et fin[1].)

IV

Jusqu’ici, nous avons vu la société, dans ses efforts pour résoudre son problème logique d’équilibre, reproduire sous des formes agrandies les mêmes solutions ingénieuses et originales, imaginées par l’esprit individuel aux prises avec un problème analogue. Mais, en y regardant de plus près, il va maintenant nous sembler apercevoir une différence importante entre les deux logiques comparées par nous. Elle n’est d’ailleurs qu’apparente, comme nous le verrons plus loin. Quoi qu’il en soit, examinons-la. Ce n’est pas tout que d’avoir accordé négativement et positivement les jugements objectifs d’attribution et de causalité, et même les jugements-desseins, les espérances et les craintes, qui se pressent en se heurtant dans la mêlée humaine ; il reste à concilier de même, ou plutôt c’est par là qu’il a fallu nécessairement commencer, et ce n’est rien moins qu’aisé, les jugements subjectifs d’amour-propre, les vanités et les orgueils. Cette difficulté, qui paraît de prime abord n’avoir point d’équivalent en logique individuelle est le plus terrible écueil peut-être de la logique sociale.

Naturellement les amours-propres sont en conflit, en contradiction, puisque chacun de nous, en naissant, est très fortement porté à s’estimer supérieur aux autres. Comment lever cette contradiction” ? Comment arranger les individualités associées, de telle façon que leurs tendances respectives à avoir pleine foi en leur propre mérite et pleine confiance en leur propre talent, reçoivent la meilleure satisfaction possible, c’est-à-dire que la somme algébrique de ces doses de foi et de confiance additionnées, durablement unies, soit la

  1. Voir le numéro d’août 1889.