Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 11.djvu/193

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
189
ANALYSEScolsenet. — La Mort et le Diable.

l’œuvre. L’auteur cherche à prouver d’abord que la mort n’est qu’une négation ; avant de la définir, il faut définir son terme positif opposé, la vie. Vient ensuite une longue critique des différentes définitions de la vie, dont le phénomène fondamental est le mouvement de substitution continue qui s’accomplit dans tout organisme et qui amène le renouvellement de toutes ses parties. L’intensité de la vie dépend donc de la rapidité de l’échange de la matière. Les forces biologiques se réduisent aux forces chimiques et mécaniques ; et la croissance ou la décroissance sont en relation directe avec l’assimilation ou la désassimilation. La mort n’est que l’interruption de ce mouvement de substitution qui s’effectue dans les tissus des êtres organisés. Nous mourons à chaque instant et notre mort définitive, en restituant aux milieux ambiants minéraux ou inorganiques les matériaux qui en procédaient, sert au renouvellement de la vie.

Qu’est-ce que l’àme ? Qu’est-ce que le corps ? Ce sont là des conceptions purement théotogiques des rapports simples ou complexes de tout ce qui existe. L’âme est une abstraction du fonctionnalisme supérieur de l’homme ; le corps, c’est tout l’organisme. « Lorsque nous considérons la matière… qu’y trouvons-nous ? Nous y trouvons ce qu’on atpelle l’attraction moléculaire et la gravitation, c’est-à-dire du mouvement la lumière propre, du mouvement ; la lumière réfléchie ou la couleur, c’est-à-dire encore du mouvement ; la réfraction, aussi du mouvement ; la chaleur, encore du mouvement ; l’impénétrabilité, c’est-à-dire l’étendue appliquée à la résistance, n’est en somme qu’un mouvement de répulsion ; et ainsi de suite. Les savants les plus éminents et les plus profonds quand ils considèrent les atomes ne considèrent que des points géométriques, c’est-à-dire une hypothèse. D’autres les considèrent comme étant des centres de mouvement. C’est ainsi qu’il ne nous reste, en réalité, que des mouvements, c’est-à-dire des relations simultanées et successives. Qu’il y ait quelque chose sous le mouvement, que la relation suppose des termes premiers qui ne soient pas d’autres relations, que ce substratum de ta phénoménatité existe, c’est ce que la philosophie, s’appuyant sur la science, ne saurait affirmer bien plus, c’est ce qu’elle n’affirmera ni ne niera jamais, parce que tout ceci n’est pas du domaine de l’observation ni de l’expérience. L’admission gratuite de l’hypothèse d’un absolu, même celle d’un inconnaissable ne nous explique rien ; elle ajoute, au contraire, de nouvelles difficultés au problème scientifique, qui ne se compose que de relations, puisque toute connaissance n’est qu’une relation plus ou moins complexe, appréciée par nous. Mais on objectera que le mouvement suppose un objet qui se meut. Ceci est tout simplement une erreur de calcul dont la routine est responsable ; c’est une faute de dialectique dans le genre, du pas d’effet sans cause. » Le reste du chapitre de M. Pompeyo Gener est un utile compendium des connaissances et des hypothèses sur la physiologie et l’anatomie du cerveau. On peut le résumer en deux mots : l’àme n’est qu’une fonction.