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ANALYSESernest krause. — Erasmus Darwin.

E. Darwin a publié des poèmes et des ouvrages scientifiques. Son premier essai dans ce dernier genre fut un article inséré dans les Philosophical transactions (1757). Son premier grand ouvrage fut un poème, Botanic Garden, le Jardin botanique, dont la seconde partie, Loves of the plants, parut avant la première, Economy of vegetation, vers 1788. Une seconde édition parut en 1790, une quatrième en 1799. En 1806, on fit une édition en trois volumes de toutes ses œuvres poétiques. Le succès, comme on le voit, avait été grand et ne s’était pas fait attendre. Darwin s’écartait cependant des idées reçues. On admettait en général, d’après Wordsworth et Coleridge, que ce qui concernait surtout la poésie, c’étaient les sentiments et les profondes opérations de l’âme ; Darwin soutenait au contraire que la poésie devait surtout se t’enfermer dans la description des objets visibles.

E. Darwin introduit dans son poème les forces de la nature personnifiées le premier chant, par exemple, est adressé aux divinités du feu, le second aux gnomes, aux esprits de la terre, le troisième aux nymphes des eaux. Il s’occupe de la formation graduelle de la terre, de la découverte du feu, de l’action de l’eau, etc. Les points qui ne peuvent être qu’effleurés dans des vers sont approfondis davantage dans des notes. C’est dans une de ces notes que nous trouvons l’idée et le premier plan de la théorie de l’évolution. — L’idée de la transformation des espèces est exprimée dans tous ses ouvrages ; dans le Jardin botanique, il se pose les questions suivantes à propos des ammonites ; « Toutes les ammonites ont-elles été détruites quand les continents se sont élevés ? Quelques genres périssent-ils par suite de la puissance croissante de leurs ennemis ? Restent-ils à d’inaccessibles profondeurs dans les mers ? Ou bien les animaux changent-ils de forme graduellement et deviennent-ils de nouveaux genres ? » (Economy of vegetation.) « Il y a, dit-il encore, certaines parties des animaux et des plantes qui paraissent inutiles ou incomplètes et semblent montrer que les êtres vivants ont graduellement quitté leur état originel… ainsi les porcs ont quatre doigts, mais deux d’entre eux sont imparfaitement formés et trop courts pour pouvoir être utiles… D’autres animaux présentent des marques de changements produits pendant un grand laps de temps, dans quelques parties de leur corps, ce qui peut être effectué pour les accommoder à de nouveaux moyens de se procurer leur nourriture. Peut-être toutes les productions de la nature sont-elles en progrès vers une perfection plus grande ; c’est une idée appuyée par les découvertes modernes et les déductions concernant la formation progressive des parties solides de la terre, et qui s’accorde bien avec la dignité du Créateur de toutes choses. »

On trouve d’intéressantes remarques dans les réflexions de Darwin sur les défenses naturelles des plantes, bien qu’il ait commis plusieurs erreurs. Dans son Botanic garden est exposé, peut-être pour la première fois, le principe de l’imitation. Il expliquait ingénieusement, mais en se trompant, la ressemblance des fleurs de plusieurs