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DES FORMES ET DES FORCES POLITIQUES

La cause qui a le plus favorisé les progrès des idées des physiologistes, c’est la découverte par laquelle nous avons appris que les organismes qui, à l’état adulte, ne paraissent avoir rien de commun, ont été, aux premières périodes de leur développement, très semblables ; et même que tous les organismes partent d’une structure commune. La connaissance de cette loi a non seulement révolutionné nos idées sur les rapports des organismes entre eux, mais aussi sur les rapports des parties de chaque organisme entre elles.

Si les sociétés se sont développées, et si la dépendance mutuelle qui relie leurs parties, dépendance que suppose la coopération sociale, et grâce à laquelle les sociétés sont de véritables corps organisés, s’est effectuée graduellement, il faut admettre que, en dépit des dissemblances qui finissent par séparer les structures développées, il y a une structure rudimentaire d’où toutes partent. Enfin, si nous pouvons reconnaître cette unité primitive, la constatation de ce fait nous aidera à interpréter la diversité finale. Nous comprendrons mieux comment dans chaque société les divers éléments de l’autorité politique en sont venus au point où nous les voyons et quelles relations ces éléments entretiennent les uns avec les autres.

Partons d’une horde non organisée, avec ses membres de tout sexe et de tout âge, demandons-nous ce qui doit arriver lorsqu’il faut décider quelque question de déplacement ou de défense contre les ennemis. Les individus assemblés rentreront plus ou moins nettement dans deux groupes. Les plus âgés, les plus forts, et ceux dont la sagacité et le courage ont été mis à l’épreuve, formeront le plus petit groupe, celui qui prend part à la discussion, tandis que le groupe le plus grand, formé des jeunes, des faibles et des gens sans illustration, borne son rôle à celui d’auditeurs, qui ne font d’ordinaire guère plus que d’exprimer de temps en temps leur assentiment ou leur désapprobation. On peut en conclure encore autre chose. Dans le groupe des meneurs, il y aura des hommes dont l’influence l’emportera sur celle des autres, quelque chasseur âgé,