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P. TANNERY. — l’éducation platonicienne

calculs sur d’autres données enfin la forme de rédaction de ces exercices est identique à cette des problèmes héroniens. Il est donc très probable que cette forme, empruntée dès l’origine aux Égyptiens par les Grecs, aura été conservée traditionnellement dans les écrits relatifs à l’enseignement de la logistique et de la métrétique, c’est-à-dire dans les recueils de problèmes qui ont certainement précédé celui de Héron, de même qu’elle a été religieusement gardée, pendant de longs siècles après lui, par les agrimenseurs romains et les compilateurs du moyen âge.

Resterait maintenant à préciser l’étendue de l’enseignement dont il s’agit. Pour la métrétique, son cadre, déterminé par les besoins de la vie usuelle, est évidemment à peu près invariable les progrès de la science théorique n’ont pour effet que d’y faire disparaître plus ou moins lentement l’emploi de formules trop grossièrement approchées ou inexactes, comme on en rencontre dans le papyrus de Rhind. Ainsi il serait ridicule de se figurer qu’avant Archimède les hommes n’avaient aucun moyen pour calculer la circonférence ou la surface d’un cercle d’après son diamètre. Ils savaient le faire dès longtemps, mais moins exactement, de même qu’aujourd’hui nous savons le faire plus exactement[1].

Pour la logistique, la question mérite un peu plus de détails. En premier lieu, il faut s’affranchir du préjugé qui consiste à regarder le système de numération grecque comme très incommode, surtout pour des opérations tant soit peu compliquées. Je me suis facilement convaincu, par ma propre expérience, que, quoique certainement moins avantageux que notre système, il est en réalité très pratique, et qu’il ne faut pas un très grand exercice pour effectuer les calculs avec une rapidité réellement comparable dans l’un comme dans l’autre.

Après les quatre règles sur les nombres entiers, on enseignait un calcul de fractions, différant du nôtre par l’emploi exclusif de fractions ayant pour numérateur l’unité. Ce calcul, dont nous ne connaissons pas exactement les détails, venait de l’Egypte et s’est perdu sous l’empire romain. L’emploi de nos fractions ordinaires semble avoir pour origine la considération des rapports numériques dans les accords musicaux, et, au temps de Platon, il ne devait être pratiqué que dans la théorie de l’harmonie.

  1. Pour le rapport de la circonférence au diamètre, 3,1415926535…, il est probable que, dès la plus haute antiquité, on prit simplement le nombre 3. Dans le papyrus de Rhind, on trouve l’approximation  ; la valeur donnée par Archimède, est devenue., comme on sait, classique jusqu’à la Renaissance ; celle des Hindous, paraît en avoir été déduite.