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P. TANNERY. — l’éducation platonicienne

harmonique, comme la nommèrent Archytas et Hippasos[1]. On chercha une définition commune à ces trois médiétés, et on trouva que le rapport des différences du moyen à chacun des deux extrêmes était le même que celui de deux des trois termes. En combinant ceux-ci de toutes les manières possibles, Eudoxe constitua trois autres médiétés, l’une dite sous-contraire à l’harmonique, les deux autres dénommées cinquième et sixième ; il est à remarquer que le calcul des moyens de ces deux dernières exige la solution numérique de l’équation du second degré, indice important de la connaissance de cette solution dès l’époque de Platon[2].

Plus tard, et à une date indéterminée, deux pythagoriciens, Temnonidès et Euphranor, étendirent la définition en prenant les différences de deux quelconques des trois termes, au lieu de celles seulement où entre le moyen. Le nombre des médiétés fut ainsi porté à dix, comme on peut les voir dans Nicomaque et dans Pappus, dont les nomenclatures offrent d’ailleurs de notables différences.

Pour identifier avec le programme platonicien au premier degré le cadre rempli par Nicomaque, nous ne voyons guères en somme à retrancher de ce dernier que ces médiétés postérieures, d’une part, et, de l’autre, la théorie des nombres parfaits, surabondants et déficients, le célèbre passage du livre VIII de la République[3] prouvant que cette théorie commençait tout au plus à s’ébaucher au temps de Platon. En revanche, ce même passage nous conduit à faire remonter jusqu’à cette époque la génération donnée par Théon de Smyrne des nombres côtés et diamètres, c’est-à-dire la solution complète en nombres entiers de l’équation indéterminée

.

Cette solution, qui donne une série de valeurs rationnelles et de plus en plus approchées pour l’incommensurable , était au reste très facile à obtenir pour les anciens, en poursuivant, d’après leur procédé, l’extraction de cette racine.

Les autres théories exposées par Théon de Smyrne se retrouvent toutes en fait dans Nicomaque.

  1. Le moyen harmonique entre deux nombres et est . Les détails historiques ci-dessus sont donnés par Jamblique dans son commentaire sur Nicomaque, p. 14).
  2. Voir notre essai L’arithmétique des Grecs dans Pappus, dans les Mémoires de la Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux, t. III, 2e série, p. 362.
  3. Voir notre essai Le nombre nuptial dans Platon, dans la Revue, t. I, 1876, p. 184 et 182.