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ne saurait plus causer d’embarras. Toute difficulté disparaît, en même temps que la théorie elle-même, qui semble pour ainsi dire s’évanouir.

Nous félicitons vivement M. de Campou de s’être rattaché à la tradition des grands mathématiciens du xviiie siècle. Ce que M. de Campou propose, Euler l’a fait dans ses Éléments d’algèbre, qu’on ne lit plus guère et qui sont peut-être le meilleur traité d’algèbre élémentaire qui existe aujourd’hui. Euler nous dit en effet (n° 16, c’est-à-dire tout au début de son livre) : « Il importe principalement ici de savoir quel signe se trouve devant chaque nombre. De là vient que dans l’algèbre les quantités simples sont les nombres considérés avec les signes qui les précèdent ou qui les affectent. On nomme quantités positives celles devant lesquelles se trouve le signe +, et quantités négatives celles qui sont affectées du signe —. » La pensée d’Euler avait été parfaitement saisie par ses contemporains. J’en trouve la preuve dans un admirable chapitre de la Langue des calculs de Condillac[1], qui pourrait servir de commentaire au travail de M. de Campou : « Qu’est-ce donc, dit Condillac, que ces quantités en moins qui n’ont lieu qu’en algèbre ? Car enfin, si ce sont des quantités, on devrait les retrouver dans toutes les langues. Je réponds qu’une quantité qu’on soustrait est une quantité, comme une quantité qu’on ajoute : — 2 est également une quantité dans — 2 et dans + 2 ; mais — 2 est l’expression d’une opération qui soustrait 2, comme + 2 est l’expression d’une opération qui l’ajoute. It ne faut pas confondre ces choses et prendre ta soustraction d’une quantité pour une quantité. Voilà cependant ce qu’on a fait. »

Nous n’insisterons pas sur les développements que M. de Campou a donnés à son principe. Ces développements appartiennent aux mathématiques pures. Tous ceux qui s’occupent de ces sciences liront avec grand plaisir et grand profit l’ingénieux et savant opuscule que nous avons essayé de faire connaître.

T.-V. C.

Fernand Labour. — M. de Montyon D’après des documents inédits. Paris, Hachette. 1880. 285 pages in-18.

L’auteur étudie successivement dans M. de Montyon le magistrat, le seigneur de village, le causeur, l’homme politique, le publiciste et le philanthrope.

M. de Montyon appartenait à la noblesse de robe il descendait de bourgeois parvenus. Mme de Fourqueux, le célèbre romancier pornographe, était sa sœur c’est là certainement le plus piquant détail de sa généalogie.

Intendant d’Auvergne, puis de Provence, enfin d’Aunis, M. de Montyon eut à lutter contre la famine. Grâce à lui, paraît-il, l’Auvergne fut sauvée. Ici peut se placer une anecdote. Le philanthrope devait porter au roi une somme assez ronde Bon nombre de ses administrés conçoivent le projet d’aller l’attendre sur la route et de s’emparer des coffres. Montyon apprend le complot, déguise un Suisse en intendant,

  1. Livre II, chapitre VII.