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Troisième question : La nature, telle qu’elle se présente à nous dans sa constitution universelle, paraît communément divisée en deux grands empires, celui des corps bruts et celui des corps organisés ou vivants, le monde physique et le monde physiologique. Cette distinction peut-elle affecter une valeur effectivement rigoureuse, mise en confrontation avec la science ? Le monde physiologique peut-il ou ne peut-il pas être considéré comme issu du monde physique, et par conséquent être tenu pour un développement où un mode particulier de celui-ci ? S’il n’en est pas ainsi, il reste à savoir quel est le degré de différence par lequel se distinguent les êtres vivants des êtres non vivants, — L’auteur sépare hardiment en deux les grands empires de l’inorganique et de l’organique et du vivant, dont les distinctions caractéristiques sont absolues et non relatives, à tel point qu’on ne peut supposer que l’un puisse généalogiquement provenir de l’autre. Ni l’animal n’est une plante transformée, ni l’homme un animal perfectionné. Et les deux derniers diffèrent principalement en ceci que l’homme a le pouvoir de réfléchir ou de se représenter ses actes et ses idées elles-mêmes, conformément à des principes généraux qui font absolument défaut à l’animal.

Quatrième question : Relativement aux êtres organisés et vivants, la science tant ancienne que moderne a toujours maintenu la division générale des trois grands règnes : le végétal, qui embrasse toutes les plantes en général ; l’animal, auquel appartiennent les animaux ; et l’intellectuel et moral, auquel appartient l’homme. Ces trois grands groupes d’êtres, ou règnes, se présentent-ils avec des caractères tellement distincts, qu’ils ne laissent le droit de supposer aucune généalogie réciproque, ou bien peut-on passer de l’un à l’autre par des transitions assez simples et graduées, pour donner lieu à l’idée que l’animal n’est pas enfin autre chose qu’une plante transformée, et l’homme rien de plus qu’un animal parvenu au dernier degré de sa perfection ? — La conclusion finale de l’auteur est que chaque règne d’êtres vivants se compose en effet de plusieurs espèces, dont chacune a une existence propre, réelle et continue. Et, bien que l’homme, sous un tel point de vue, forme un règne à part, ce règne n’est pas, comme les autres, divisé en plusieurs espèces. Il n’y a véritablement qu’une seule espèce d’hommes partagée en différentes races. C’est ce qui établit le principe de la fraternité universelle et donne un fondement solide aux principes sur lesquels reposent les plus grands intérêts moraux, sociaux et civils.

Ces différentes questions, dont chacune forme l’objet d’un livre, peuvent se réduire à celle-ci : déterminer ce qu’est l’homme dans l’ensemble de ses caractères et de ses relations mis en rapport avec les caractères et les relations des autres êtres, et en particulier de l’animal, c’est-à-dire déterminer métaphysiquement et anthropologiquement quelles sont ses conditions d’existence, sa vraie origine, ses “destinées, au double point de vue de l’individu et de la société. Mais