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DÉTERMINISME ET LIBERTÉ

3e et dernier article[1]

La liberté démontrée par la mécanique.

La liberté existe et elle est l’apanage de tout être sensible. Elle s’exerce par la volonté. Ce dernier terme désigne un phénomène psychique, un phénomène interne. Quel est le phénomène physique ou externe qui lui correspond ? C’est nécessairement une action mouvante, car, sinon, la volonté n’aurait aucun pouvoir sur les choses, elle ne serait rien. Cependant, nous le savons, la volonté n’est pas une force dans le sens que la mécanique donne à ce mot, c’est-à-dire une cause de mouvement (ou d’équilibre) ayant une intensité, une direction et un point d’appui déterminés. Le principe de la conservation de l’énergie, principe aussi indiscutable que celui de la conservation de la matière, s’y oppose péremptoirement,.

La volonté ne peut avoir à sa disposition que le temps. Sollicitée d’agir, en d’autres termes, de transformer en travail les forces potentielles accumulées dans l’organisme, elle ne peut que reculer et aussi, comme nous le verrons, avancer le moment de la transformation.

Si la réponse à la sollicitation se fait attendre, il n’y a pour cela rien de détruit ; et, quand elle vient, la quantité du travail effectué est exactement la même que s’il n’y avait pas eu de retard.

Mais si la quantité de l’effet mécanique est indépendante de l’époque où il se produit, il n’en est pas de même de sa qualité. Entre les résultats d’un coup de feu tiré maintenant ou tantôt, il peut y avoir des différences considérables.

D’où cela provient-il ? De ce que les choses se transforment incessamment.

La transformation est souvent forcée, parfois elle est libre. Ainsi l’arbre, à la sortie de l’hiver, se couvre de feuilles, de fleurs et de

  1. Voir les numéros de mai et juin de la Revue.