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vent les éléments de la fonction spéciale que nous leur assignons, » M. Cyon[1] ne repousse point absolument cette théorie ; mais, comme le fait observer le prof. Crum Brown, cette idée, qui vient sans doute de la disposition de cet appareil et du rapprochement qui existe entre lui et l’organe de l’audition, n’est point étayée par les faits ; et nous ne reconnaissons la direction du son que par deux ou plusieurs observations, simultanées ou successives. On ne voit guère, du reste, la nécessité d’un appareil aussi complexe que l’ensemble des six canaux, pour une perception relativement si peu importante et qui peut s’obtenir par d’autres moyens.

Les célèbres expériences de Flourens, qui datent de 1828, ont été répétées par bien des physiologistes ; et leurs résultats sont maintenant hors de doute. Sans vouloir décrire ici de nouveau ces expériences si connues, on peut les résumer dans les termes mêmes de Flourens. « La section de chaque canal produit un mouvement dont la direction est toujours la même que celle du canal coupé. » Mais si, malgré les objections de M. Böttcher[2], on s’accorde aujourd’hui à regarder ces mouvements comme réellement déterminés par la seule lésion des canaux, on est bien loin d’être d’accord sur la signification à leur donner. D’après certains auteurs, ils prouveraient que les canaux sont les organes de la coordination des mouvements. C’est là l’idée exprimée par Flourens[3] : « Dans les canaux semi-circulaires et dans les fibres opposées de l’encéphale résident les forces modératrices des mouvements. » Mais ce fut Goltz[4] qui imagina le premier une théorie physique pour expliquer comment les canaux remplissent cette fonction. Voici l’exposé sommaire de cette théorie : On peut supposer que les terminaisons nerveuses situées dans les ampoules sont stimulées par la pression, comme cela se produit pour les nerfs de la peau. L’endolymphe contenue dans les canaux presse nécessairement davantage sur la partie des parois de la cavité qui est située au point le plus bas ; et à chaque position de la tête répondra une disposition spéciale de la pression ; et, par conséquent, une sensation particulière correspondra à chacune de ces positions de la tête. M. Goltz a prouvé, en effet, qu’en fixant la tête d’un pigeon dans des positions anormales l’animal présente des troubles en partie analogues à ceux qui suivent la section ou la destruction des canaux. Il en a conclu qu’une certaine notion de la position de la tête, et la faculté de la règler, sont nécessaires au maintien

  1. Loc. cit, p. 93.
  2. Archiv für Ohrenheitkunde, lX, 1874.
  3. Recherches expérimentales sur les propriétés du système nerveux, 1842, p. 501.
  4. Pflägers Archir, Bd. III.