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C. VIGUIER. — le sens de l’orientation

Les limites de ce travail s’opposent à ce que je reprenne la discussion détaillée des solutions proposées par les divers auteurs. Ceux qui veulent approfondir la question devront lire au moins la thèse de M. Cyon[1], et les articles de MM. Crum Brown[2] et Croom Robertson[3]. Quant à moi, je dois me borner ici à énoncer simplement les diverses réponses qui ont été faites aux deux questions ci-dessus ; je montrerai ensuite dans quelle mesure ma théorie peut s’accorder avec celles de mes prédécesseurs, et comment elle peut quelquefois les concilier.

Relativement à la nature des sensations, on est généralement d’accord pour les regarder comme inconscientes, ainsi que les sensations d’innervation. Pour ce qui est de leur usage, elles contribueraient à la détermination de la direction des ondes sonores, à la coordination des mouvements et au maintien de l’équilibre, à la mesure des mouvements de rotation de la tête autour de ses divers axes, enfin à la formation de la notion de l’Espace.

Les excitants physiologiques seraient : les vibrations sonores, les vibrations de l’air, qu’elles soient ou non comprises dans les limites où elles sont perceptibles par notre oreille, la pesanteur ou l’inertie du liquide labyrinthique, et les ébranlements mécaniques déterminés par les changements de position de la tête.

La première de ces théories, émise par Autenrieth et Kœrner[4], se trouve développée dans le traité de physiologie de Dugès[5]. « Bien que les vibrations (sonores) se propagent en tous sens, les expériences de Savart ont prouvé qu’elles ont surtout de la tendance à se transmettre dans le sens de l’impulsion primitive, dans le sens du mouvement suivi par l’instrument frappant ou frottant (archet)… Sans doute la force de la sensation, plus grande dans une des oreilles que dans l’autre, nous aide à la détermination dont il s’agit ici ; mais ce signe ne peut indiquer que le côté vers lequel est le point de départ des ondulations sonores, et ne nous apprend rien sur le haut, sur le bas, l’avant ou l’arrière de sa position… C’est par l’intermédiaire des parois du crâne que les canaux demi-circulaires reçoi-

  1. Cyon, Recherches expérimentales sur les fonctions des canaux semi-circulaires et sur leur rôle dans la formation de la notion de l’Espace (thèse de la Faculté de médecine de Paris, 1878, n° 114).
  2. Crum Brown, On the sense of Rotation (Proceed. of the Roy. Soe. of Edinb., 1874, t. VIII, p. 255 et 370, et Journal of Anatomy and Physiology, t. VII, 1875 et Cyons Researches on the Ear(Nature, 10 et 17 oct. 1878).
  3. Croom Robertson, The semi-circular canals and Lie « Sense of Space » (Mind, 1878, p. 559).
  4. Beubachtungen über die Function einzetner Theile des Gehörs (Reils Archic fur die Physiologie, 1X, p. 328, 1810).
  5. Physiologie comparée de l’homme et des animaux, 1838, p. 189.