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qualifie l’œuvre d’assemblage d’hypothèses gratuites et sans valeur, prétend, au contraire, que la sphère visuelle est représentée, chez le singe comme chez le chien, par le lobe occipital. Des ablations partielles de ce lobe déterminent des troubles visuels manifestes, encore que passagers. L’auteur relate, à ce propos, un détail qui lui semble absolument caractéristique : dans les premiers jours qui suivent l’opération, lorsque le singe veut considérer attentivement un objet de petites dimensions, on le voit porter la main au-dessus de ses yeux, en manière d’abat-jour, ou se les frotter, comme ferait un homme qui ne voyant pas très distinctement, s’efforcerait de s’éclaircir la vue. L’ablation de tout un lobe occipital entraîne, chez le singe, l'hémiopie, c’est-à-dire que l’animal est atteint de cécité pour les moitiés correspondantes des deux rétines. Si, par exemple, l’extirpation a emporté la sphère visuelle du côté gauche, l’animal, non seulement ne reconnaît pas, mais ne voit plus les objets dont l’image vient se former sur les moitiés gauches de ses rétines, tandis qu’il voit et reconnaît tout parfaitement par leurs moitiés droites. Enfin, après l’extirpation des deux lobes occipitaux, il y a cécité corticale complète et définitive : le singe ne voit plus rien.

Quant à l’existence, sur le cerveau äu singe, d’un centre de la vision distincte, c’est un point que Munk n’a pu suffisamment élucider.

II. — Sphère auditive (Hörsphäre).

Cette sphère corticale est représentée sur le lobe temporal par l’espace BB, (fig.  2).

L’extirpation bilatérale du point B1, situé au voisinage de l’extrémité inférieure de ce lobe, entraîne la surdité psychique (Seelentaubheit), c’est-à-dire la perte des images commémoratives des perceptions auditives antérieures. Les expériences faites sur cette zone prêtent d’ailleurs aux mêmes considérations que celles faites sur la sphère visuelle. L’ablation de B, n’est point suivie de surdité, à proprement parler ; le chien entend encore, mais il ne comprend plus les bruits qu’il entend ; peu à peu, et grâce à l’intégrité de la portion de la sphère auditive qui reste autour de Ba, il réapprend à connaître le sens des sons, el à en apprécier successivement l’origine, la direction, les caractères différentiels, et finalement à guider sur eux ses mouvements. Un mois environ après l’opération, l’animal est revenu à l’état normal. Mais, de même que nous avons vu la cécité corticale succéder aux extirpations qui emportent la totalité de la sphère visuelle, de même ici l’extirpation étendue de l’écorce grise à la surface des deux lobes temporaux détermine la surdité corticale (Rindentaubheit), le chien étant désormais incapable de percevoir aucun bruit, si rapproché et si intense qu’il soit. Il n’y a pas, il est vrai, grand fond à faire sur les résultats de ces larges abrasions, la gravité du traumatisme ne permettant guère la