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ANALYSES.s. corleo. Filosofia universale.

— il nous dirait comment il se peut faire qu’une telle discorde et une telle anarchie règnent dans une nature élevée et un grand esprit, — et il se résignerait peut-être, ne fût-ce que pour ne point contredire lui-même sa théorie, à donner à l’un des groupes le pas sur l’autre, et à réaliser dans son esprit cette organisation toute de subordination et de hiérarchie, qui fait seule, comme il le dit si bien, « la pensée vraiment objective et l’originalité puissante. »

L. H.

Simone Corleo. — Il sistema della filosofia universale ovvero la filosofia della identita ; Rome, typog. du Sénat, 1880. 327 p.  in-8o.

M. Corleo, voulant constituer une philosophie universelle, part d’un fait commun à toutes les sciences : la pensée, et, imitant le positivisme moderne « en ce qu’il a de raisonnable », il commence par l’observer. Il recueille dans la pensée, comme elle se présente, tout ce qui se présente, sans rien présupposer, sans admettre pour certain rien de ce qui doit être objet d’examen.

I. Noologie et logique. — Or, dans tous les phénomènes de la pensée, il constate une loi fondamentale, qui est celle de la double identité : l’identité élémentaire, ou l’identité entre elles de certaines représentations, et l’identité entre elles de certaines autres représentations diverses des premières ; et l’identité totale, ou l’identité de la représentation totale avec la somme de toutes les représentations partielles. Par exemple, chacune de nos perceptions de couleur, de son, de contact, de saveur, de faim, de soif, etc., resterait confuse et comme inconsciente, si les mêmes perceptions ne se répétaient pas plusieurs fois identiquement, si en se répétant elles ne présentaient pas quelques points identiques et quelques points divers, ceux-ci, nous l’avons dit, formant aussi plusieurs catégories d’identiques. Ne vous semble-t-il pas ici reconnaître l’intégration et la différenciation de Spencer ? Cet empirisme de la conscience aboutira, certes, chez M. Corleo, à un absolu bien différent de celui de l’illustre évolutionniste. Mais poursuivons notre analyse. Cette loi de double identité gouverne la reproduction de toutes nos pensées, de nos opérations les plus humbles jusqu’aux plus élevées. La perception ou la partie de perception présente identique répète tout ce qu’il y avait d’identique dans la représentation précédente, et, par raison d’identité totale, la partie réclame les autres représentations partielles, bien que diverses, qui composent l’identique total précédent. » (P. 16) L’abstraction est fondée sur la même loi : « Le mot abstraction exprime exactement cette espèce d’isolation qui sépare l’identique de tous les divers auxquels il est ordinairement uni. » (P. 17) Cette loi produit aussi la synthèse des abstraits, qui pousse à un nombre indéfini de nouveaux abstraits. Ainsi, la couleur blanche peut se trouver unie à des éléments tout à fait divers, au froid et au chaud,