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sont pas des phénomènes vides de substantialité, ne peuvent pas se succéder en une seule substance. L’espace est donc aussi réel que les corps et que leurs relations variables de contact, auxquels il est identique. C’est là l’objectivité unique et vraie de l’idée d’espace ; c’est pourquoi elle est subjective objective, et non subjective seulement. L’idée d’espace vide n’est pas vraie (p. 77). » — « L’idée de temps n’est pas purement subjective, elle ne représente pas uniquement la succession interne de nos sensations, ou en général de nos pensées… La succession des pensées est une succession de changements également réels en dehors de nous, qui sont autant de causes de nos changements subjectifs. Ainsi l’idée du temps est subjective-objective et correspond au véritable changement de rapports entre les éléments extérieurs. En dehors du monde, comme l’espace, le temps n’a pas de réalité. » Nous verrons plus loin que cette affirmation de la pluralité des éléments, soit subjectifs, soit objectifs de la pensée, ne paraît pas à M. Corleo être en contradiction avec la croyance à l’existence d’un élément spirituel dans l’ensemble des éléments psychiques, non plus que l’antagonisme entre l’idée de temps et l’idée d’éternité ne l’empêchera de reconnaître l’existence, en dehors de la matière soumise aux temps et au changement, d’un être un et éternel. C’est, du reste, avec la même loi d’identité, que l’auteur explique la subjectivité-objectivité des autres idées et conceptions métaphysiques que nous avons énumérées ci-dessus. Mais, quoi qu’il fasse, l’universel, le nécessaire qu’il tire de l’empirisme n’en sort qu’à demi, l’identification de son idéologie psychologique avec son ontologie métaphysique ne tient qu’à un fil.

III. Cosmologie et théologie. — L’auteur examine maintenant, dans leurs relations avec les idées métaphysiques fondamentales, les principes lois cosmologiques, l’agrégation, l’attraction, le mouvement et le repos, les affinités chimiques, les divers états moléculaires de la matière, et les lois de l’organisation, toutes lois qui, « dans l’homme, le type le plus parfait de l’échelle zoologique, conspirent harmonieusement à la formation de son identique total. » Essayons d’être bref, ce qui, dans un sujet si vaste et si complexe, ne serait pas fort aisé, même si nous nous contentions d’effleurer tous les points essentiels.

L’agrégation continue et nécessaire des éléments qui constituent la matière est une conséquence des idées rectifiées de substance et d’espace. Cette agrégation est nécessairement multiforme (difforme), puisque les éléments qui la constituent ne peuvent être des composés égaux en nombre. « En d’autres termes, cette continuelle diversité de corps grands et petits, de masses et de molécules dont nous sommes spectateurs, n’est point accidentelle, mais nécessaire et inévitable dans l’agrégation cosmique. » (P. 92.) La raison en est que l’infini mathématique et par conséquent physique n’existant pas, l’agrégation étant continue, et le nombre des éléments déterminé et précis, il est bien certain qu’il doit y avoir une périphérie, ayant telle ou telle figure (peu importe), et un ou plusieurs centres en correspondance avec la péri-