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ANALYSES.s. corleo. Filosofia universale.

phérie même… Les conditions d’agrégation, la somme des contacts actifs, qui doivent porter chaque élément sur lui-même, ne sont pas égaux ni les mêmes entre les substances qui sont au centre et celles qui sont à la périphérie, à une partie du rayon ou à une autre. C’est là une raison géométrique, partant absolue, constante et nécessaire. » D’où, comme conséquences, la composition diverse et la densité diverse des corps résultant de cette agrégation. Les agrégations et les densités étant diverses, il existe en elles une raison continue d’équilibre partiel et de rupture d’équilibre. Le mouvement et le repos, tous deux relatifs, sont donc nécessaires et inhérents à la matière, dès que la matière existe. Le mouvement ne peut pas lui être imprimé par une force externe ; il résulte nécessairement de l’agrégation diverse de ses éléments actifs. Mais « peut-il y avoir une succession éternelle, une succession sans principe, un mouvement qui ne commence jamais ? » (P. 147.) L’auteur affirme le contraire. N’a-t-il pas déjà démontré que le temps et la succession ne peuvent être éternels ? Or il ne peut y avoir de mouvement sans succession de rapports et le mouvement est identique au temps, il doit avoir un commencement. Et, comme le temps n’existe qu’avec la matière, la matière a commencé aussi, et voilà démontrée, à notre grand étonnement, la création ex nihilo. La pluralité est un fait, qui a commencé et qui dure ; elle doit donc son origine à l’un qui est éternel. Sur les autres preuves, soit à priori, soit à posteriori de l’existence de Dieu, qui lui seraient superflues M. Corleo ne s’étend pas il les trouve même toutes défectueuses. Il déclare aussi insuffisants et dangereux, en ce qu’ils confinent à l’anthropomorphisme, les arguments sur lesquels on s’appuie ordinairement pour démontrer les attributs de la divinité. Il nous laisse ignorer quelles sortes de relations cet Un ex machinâ peut avoir avec le monde, qu’il a créé par caprice, ce qui est contradictoire, et sans sortir de son immutabilité éternelle, malgré l’acte créateur qui est réellement ultérieur à sa non-perpétration. Si le monde de M. Corleo entre dans le temps par la création, il nous paraît clair que son Dieu y entre aussi en le créant.

IV. Anthropologie et sociologie. La métaphysique de l’identité nous ménage de nouvelles surprises. Qu’en anthropologie l’auteur accorde plus d’importance à l’identique commun, à la psychologie générale, qu’aux différences dépendant du tempérament, de la race, de l’hérédité, des mœurs, des milieux, nous le comprenons sans peine. Nous comprenions beaucoup mieux, et même nous approuvions, en voyant que, pour M. Corleo, « la sensation est un résultat d’éléments subjectifs, c’est-à-dire humains, et d’éléments objectifs, c’est-à-dire extérieurs à l’homme (p. 167) ; et que, « subjectivement considérée, elle n’est que la résultante de ses organes mêmes, puisque l’effet est identique à l’ensemble des éléments qui le constituent (171). » Cependant nous faisions les plus légitimes réserves, lorsque l’auteur concluait des différentes caractéristiques des opérations mentales à la constitution nécessaire des organes subjectifs de ces opérations : on