Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 16.djvu/237

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


LA MEDECINE GRECQUE

ET SES RAPPORTS À LA PHILOSOPHIE


La première origine de la médecine en Grèce est fort obscure et se perd dans les nuages de la mythologie. Ce qui paraît certain, c’est qu’elle a son berceau dans la religion, comme la philosophie, comme la civilisation même. Esculape en serait le père et le dieu tout à la fois. Podalire et Machaon l’auraient introduite, avec le culte d’Esculape, le premier dans le Péloponnèse, le second en Asie Mineure. Des Asclépions furent alors bâtis çà et là, en des endroits salubres, sur les hauteurs, parmi des bois sacrés ; et, dans ces temples, les malades furent traités et quelquefois guéris par les prêtres, au moyen de remèdes plus ou moins efficaces, mêlés à des cérémonies superstitieuses[1]. C’est l’âge des temples ; c’est l’enfance de la médecine grecque, d’abord exclusivement religieuse[2].

Mais un mouvement se fait bientôt dans les esprits. Du libre génie grec sort spontanément la philosophie, c’est-à-dire la curiosité universelle, qui s’applique à tout pour tout expliquer. Or la philosophie ne se livre pas seulement pour son propre compte à toutes sortes de recherches médicales, elle provoque, à côté d’elle, la naissance d’écoles médicales, qui s’inspirent d’elle, d’écoles libres comme elle. Telles sont les écoles de Crotone et d’Agrigente, et peut-être l’école de Cyrène, citée et vantée par Hérodote, mais dont le vrai caractère est mal connu[3]. — À peu près dans le même temps, les gymnases prennent de l’importance. Les directeurs de ces établissements, gymnasiarques et gymnastes, invités par leurs fonctions même à donner à leurs clients des soins hygiéniques, à remédier aux accidents, construisent peu à peu un système médical qui leur est propre et fondent une sorte de médecine populaire, qu’on peut

  1. Voir Littré, Œuv. compl. d’Hipp., t.  I, pp. 9, 10 ; Bouchut, Hist. de la méd., t.  I, pp. 15-18.
  2. Littré, ibid., pp. 5, 6.
  3. Houdart, Hist. de la méd. grecq., l. III. pp. 128-133.