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un accord invariable et transformer ainsi les premiers en indication[1]. Est-ce à Themison même, ou à quelqu’un de ses successeurs, qu’il faut attribuer ces développements, ces perfectionnements de la doctrine générale ? Les documents dont nous disposons ne permettent pas de répondre certainement à cette question. On peut supposer que ce progrès s’est fait postérieurement à l’inventeur des grandes communautés, sous le feu de l’ennemi, c’est-à-dire par la nécessité de répondre aux écoles rivales. Mais c’est là une conjecture qui ne peut se réclamer d’aucun texte.

Tout porte à croire que la méthode des méthodiques était complète et parfaite quand parut Thessalus ; elle avait dû recevoir, dans l’intervalle qui le sépare de Themison, toutes les additions et corrections dont elle était succeptible. Tout indique que Thessalus n’y ajouta rien, qu’il n’en voulut être et qu’il n’en fut que l’abréviateur. C’était un homme sans visées scientifiques, plein de lui-même et vantard, et qui se faisait fort d’enseigner toute la médecine dans l’espace de six mois. Pour obtenir un tel résultat, il ne fallait pas approfondir, mais réduire ; il ne fallait pas développer, mais simplifier. On peut donc affirmer qu’il simplifia la méthode de ses devanciers. Et on ne courrait guère risque de se tromper en pensant qu’il est l’inventeur de cette extrême systématisation, qui, transportant les communautés dans le traitement, inscrivait en regard des deux communautés morbides : le resserrement et le relâchement, deux communautés curatives : le laxatif et l’astringent, et deux communautés chirurgicales : le retranchement d’un corps étranger et celui d’une partie de notre propre corps[2]. Il passe pour avoir inventé, en thérapeutique, la métasyncrèse, qui, renouvelant totalement les pores, doit guérir toutes les maladies[3].

Telle est la physique, telle est la logique, en un mot telle est la philosophie des méthodiques. Cette philosophie comprenait sans doute plus d’une théorie particulière dont nous ne pouvons même soupçonner l’existence, les ouvrages des maîtres n’ayant pas survécu et ceux des disciples étant exclusivement consacrés à la thérapeutique. Le De re medica, sauf la préface, n’est qu’un traité des maladies et de leurs remèdes ; et de même le De morbis acutis et chronicis, à l’exception du chapitre 14 du livre premier, consacré à la doctrine générale d’Asclépiade. Il y a toutefois dans ce dernier ouvrage un autre chapitre, où l’on voit la trace de l’esprit philosophique qui ani-

  1. ibid., ch.  35.
  2. Galien, Introd. ou du Médecin, ch.  3.
  3. Lire la description du fameux cercle métasynerétique, Cœl., Aurel. De morbis chronicis, ch.  1.