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paulhan. — croyance et volonté

L’instinct des animaux n’est pas si imperfectible que ce que l’on a prétendu ; quant à la volonté de l’homme, il ne faudrait pas exagérer son degré de perfectionnement possible. Nous connaissons bien des personnes, d’intelligence peu élevée, qui accomplissent journellement le même tâche dans des conditions analogues et qui seraient incapables de s’adapter à des conditions différentes. Cependant leurs actes sont volontaires, personne ne les considérera comme des phénomènes soustraits à ce qu’on appelle l’influence de la volonté. D’un autre côté, les réflexes inconscients et involontaires peuvent acquérir un certain développement et se perfectionner, ou au contraire diminuer et disparaître. La sensation de contact dans la bouche, qui d’abord tend à provoquer le vomissement, peut par l’habitude se supporter impunément. Certains actes réflexes qui ne se produisent pas tout d’abord arrivent à se produire à un moment donné sans avoir jamais passé par l’état d’actes ou de phénomènes volontaires, au moins dans la vie de l’individu. Le petit enfant ne sourit pas avant un certain âge, il ne suit pas des yeux un objet brillant qui passera devant eux, etc. Les phénomènes des fonctions sexuelles sont un excellent exemple de réflexes s’établissant assez tard’sans que la volonté intervienne. Nous ne pouvons donc trouver le critérium que nous cherchons. « La moelle, dit M. Maudsiey[1], est le centre, non seulement d’une activité coordonnée, dont la faculté est inhérente à sa constitution dès le début, mais aussi d’une activité coordonnée qui s’acquiert graduellement et est mûrie par l’expérience individuelle. La moelle, comme le cerveau, a en quelque sorte sa mémoire et a besoin d’éducation. »

Citons encore ceci :

« Au moyen d’une série d’expériences ingénieusement conçues, Goltz a montré que, même quand les membres d’une grenouille étaient placés et fixés dans des positions qui n’auraient jamais pu se produire dans son expérience passée, l’animal, dépouillé de ses hémisphères, conservait la faculté d’adapter ses mouvements en concordance avec ces conditions extraordinaires et anormales. Ceci tendrait à établir que, si ces centres sont simplement des centres d’actes réflexes, la réaction est celle d’une machine qui possède, en quelque sorte, la faculté de s’adapter elle-même[2]. »

Reste la complexité. Ici encore on ne trouve rien de parfaitement caractéristique. Certains actes volontaires ne paraissent pas offrir plus de complexité que certains faits parfaitement automatiques, ni

  1. Maudsley : Physiologie de l’esprit, trad. Herzen, p. 139.
  2. Ferrier : Fonctions du cerveau, p. 61.