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férents, il est bien évident que l’individu qui écrit sera impuissant à retenir et à contre-carrer, à tous les instants, les impulsions de son activité qui tend à s’échapper par chaque trait suivant sa caractéristique personnelle ; et de fait, dans les écritures simulées avec le plus grand soin, et dont l’expertise légale a été faite, cette caractéristique a été retrouvée à chaque pas, dans les lettres mêmes qui avaient été défigurées avec la plus grande habileté. C’est ici qu’il y aurait lieu de dire : « Chassez le naturel, il revient au galop ; » et prétendre le contraire reviendrait à dire qu’un individu peut être capable de rester toute une journée sans laisser échapper le moindre geste inconscient.

Bien des questions encore eussent été, sinon à traiter, du moins à énoncer ; celles de savoir, entre autres, si l’écriture a un sexe, et ce que deviennent les signes graphiques dans les écritures étrangères : questions qu’il est d’ailleurs aisé de résoudre avec les données précédentes.

Nous nous arrêterons donc ici, ayant d’ailleurs conscience d’en avoir trop dit pour la patience du lecteur. Mais il était indispensable d’insister sur un certain ordre de considérations qui nous ont semblé pouvoir servir de base à l’étude raisonnée de la graphologie, et lui fournir ses principes.

C’est peut-être pour avoir négligé ces questions préliminaires, que les créateurs de cette jeune science ne l’ont vu accueillir qu’avec réserve, pour ne pas dire plus, dans le monde où il lui faudra cependant pénétrer, si elle veut jamais dépasser les limites de l’empirisme préscientifique qu’elle n’a pas encore franchies. Et c’est parce que nous pensons qu’elle mérite grandement d’être revue et étendue par ceux qui s’occupent de psychologie et de physiologie que nous avons tenté l’essai de la leur présenter.

J. Héricourt.