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ANALYSES.fornelli. Educazione moderna.

tout état de question, pour la résoudre, à l’idée et au mot de contradiction, confirme une fois de plus la suprême dignité et l’importance de notre principe. »

J’ai formulé, chemin faisant, mon appréciation sur les divers points étudiés par l’auteur. Elle est plutôt favorable qu’autre chose. S’il m’était possible de présenter un compte rendu même succinct de la seconde partie de l’ouvrage, deux fois plus étendue que la première, j’aurais souvent à discuter avec M. Caroli. Dans cette partie, il justifie sa méthode en l’appliquant à la critique des principaux systèmes ou méthodes introduits dans le champ philosophique. Il juge toujours avec compétence, souvent avec sévérité, quelquefois avec une apparente contradiction, l’ontologisme de Rosmini, le criticisme Kantien, le positivisme spencérien, le positivisme physiologique, le phénoménisme de Taine et celui de M. Renouvier. Aucune de ces discussions, et surtout des trois dernières, ne manque d’intérêt. En un mot, le désaccord qui se trouve çà et là entre les opinions philosophiques de l’auteur et les miennes, ne m’empêche pas de reconnaître qu’il a plus d’une fois frappé juste, au défaut de la cuirasse, les métaphysiciens de tout bord, qui, plus savants et plus illustres que lui, n’ont pas toujours fait effort, comme lui, pour s’appliquer ce mot de Renouvier : « J’oppose une fin de non recevoir à tous les systèmes »[1].


N. Fornelli. — Éducazione moderna. Turin, Bertolero, 1884. 250 p. in-12.

Voici encore un bon livre, pratique, avec des considérations générales, mais non poussées à perte de vue, sans grande originalité d’idées, marqué pourtant d’une empreinte personnelle. Un peu trop décousu aussi, découpé en menus chapitres qui rompent çà et là le fil de l’attention ; à cela près, facile à lire. Il a surtout pour but de montrer l’influence de l’instruction moderne, laïque, scientifique sur la formation du caractère. J’en vais donner une courte analyse.

La science, qui doit régner de mieux en mieux dans l’école, peut contribuer de plusieurs manières à l’éducation morale. Par la suppression de toute autorité étrangère à l’esprit, elle encourage chez les jeunes gens cette indépendance qui confine à l’orgueil et à l’indocilité, mais qui trouve en elle-même des ressources naturelles pour se contenir et s’épurer, et devenir une énergie plutôt capable de bien que de mal. L’habitude de la recherche naturelle est propre à développer le sentiment de la responsabilité. Elle nous excite et nous prépare à demander à nos actions, comme à tout ordre de faits, leurs causes ou leurs mobiles réels ; à distinguer plus ou moins justement, entre leurs différents facteurs, ceux qui, psychologiquement et physiologiquement, sont rapportables

  1. Essais de critique générale, Logique, 1815, t.  1, p. 40.