Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 20.djvu/663

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
659
périodiques

lieder), qui peut être considéré comme l’émanation de l’âme du peuple (Volksseele), puisqu’il exprime les sentiments qui se retrouvent chez tous.

La musique peut aussi servir à exprimer des représentations concrètes ; les naturels d’Ashanti soutiennent qu’ils peuvent s’entretenir entre eux en jouant de leurs flûtes.

En même temps qu’elle est un produit de l’émotion, et qu’elle fait naître elle-même l’émotion, elle peut, mais indirectement, produire une impression de calme et de repos ; en ce cas elle fait disparaître un sentiment en éveillant un autre sentiment.

Dans les premiers temps de la vie humaine, lorsque le sentiment national n’existe pas, on trouve partout des instruments, des mélodies semblables. Quand les sentiments nationaux se développent, la musique, qui cherche à les exprimer aussi exactement que possible, devient différente chez les différents peuples : la musique n’a pas les mêmes caractères en France, en Italie et en Allemagne. Pendant l’expédition d’Égypte, Monge faisait exécuter au Caire par un grand nombre de musiciens, de la musique savante, des mélodies simples et douces, des marches militaires, des fanfares éclatantes et ne produisait aucun effet sur les Musulmans. L’air de Marlbrough (d’origine arabe) produisit sur eux l’impression la plus vive.

Le Jodel paraît, d’après son caractère, appartenir aux pratiques musicales les plus primitives. Il semble consister en une série assez courte de sons éclatants, accompagnés non de mots, mais de lettres ou plutôt de voyelles ; ce qui le caractérise essentiellement, c’est qu’il est une variation prolongée entre la voix de poitrine et la voix de tête avec intermittence du fausset. Que le Jodel ne soit pas l’origine du chant, c’est ce que montre, outre beaucoup d’autres raisons, le fait qu’on ne trouve nulle part d’intermédiaires qui nous permettent de passer de l’un à l’autre. Il n’y a pas un chant des époques primitives qui ne soit accompagné de mots ; ce qui caractérise le Jodel, c’est qu’il exclut les mots. Enfin le Jodel ne peut exprimer un certain nombre des sentiments que nous avons signalés comme une des sources les plus importantes de la musique, les sentiments mystico-religieux.

G. Glogau. Empirisme et doctrine de la science. — Dans un premier volume dédié à Steinthal et analysé par Steinthal lui-même (vol.  XIII, p. 178), l’auteur avait donné une vue idéale du développement de l’esprit en prenant pour point de départ les principes de la psychologie ethnique, puis il avait montré la loi interne de ce développement. Il annonce aujourd’hui l’apparition du second volume de son ouvrage (Abriss der philosophischen Grundwissenschaften) et explique le but qu’il s’est proposé : éclaircir les principes fondamentaux de la métaphysique, de l’esthétique et de la morale en tenant compte de leurs rapports réciproques. Il croit qu’il convient de revenir à Kant ; mais tout en trouvant insuffisantes les doctrines empiriques, il distingue sa doctrine de la science des théories de Fichte et de Schelling. L’un et l’autre procè-