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la fin des gueux


Et quand on est vieux, camarade,
C’est fait ! Alors on se sent las.
Le teint verdit comme salade.
Le corps sèche comme échalas.

On a le nez long, et l’œil terne,
De l’étoupe jaune au menton,
Et plus d’huile dans la lanterne.
On crache blanc comme coton.

Et l’échine qui se détraque !
Et les jambes ! les reins ! le cou !
Pour jeter à bas la baraque.
Il ne faut plus un bien grand coup.

C’est alors qu’une ménagère
Vous serait bonne, et de l’argent ;
Ça vous rendrait la mort légère.
Mais va-t’en voir s’ils viennent, Jean !

C’est fait, c’est bien fini, te dis-je.
Toi, le beau vaillant compagnon
Dont la gaîté fut un prodige,
Te voilà vieux, laid et grognon.

Et les fillettes printanières
Ont peur de tes longs doigts poilus ;
Les enfants te jettent des pierres ;
Personne ne te connaît plus.