Page:Riemann - Œuvres mathématiques, trad Laugel, 1898.djvu/30

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marque toute spéciale. La méthode en question est, de nos jours, très peu prisée des mathématiciens, habitués aux recherches abstraites. Il est alors d’autant plus satisfaisant de voir une autorité mathématique, comme Riemann, en faire usage lorsque l’occasion s’en présente et savoir en tirer les conséquences les plus remarquables.


Il nous reste encore à parler des deux grandes esquisses que présente Riemann en 1854, à l’âge de 28 ans, lors de son « Habilitation » : le Mémoire Sur les hypothèses qui servent de fondement à la Géométrie, et l’écrit : Sur la possibilité de représenter une fonction par une série trigonométrique. Il est extraordinaire que le public mathématique général ait apprécié si différemment ces deux travaux. Les hypothèses qui servent de fondement à la Géométrie ont depuis longtemps reçu l’accueil que méritait cette œuvre, et cela surtout depuis que Helmholtz y porta son attention comme nombre d’entre vous le savent ; mais l’étude relative aux séries trigonométriques n’a été connue pendant bien longtemps que dans un cercle restreint de mathématiciens. N’empêche que les résultats qu’elle renferme ou, je dirais plutôt, les considérations auxquelles cette étude a donné lieu, et celles qui s’y rattachent, sont de l’intérêt le plus élevé au point de vue philosophique des théories de la Science.


Pour ce qui est des hypothèses de la Géométrie, je n’ai pas l’intention de m’étendre sur la portée philosophique de la question, car je n’ai rien de nouveau à en dire aujourd’hui. Dans cette discussion, il s’agit, pour les mathématiciens, moins de l’origine des axiomes géométriques que de leur corrélation logique. La question la plus célèbre est celle qui a trait à l’axiome des parallèles.

Les recherches de Gauss, Lobatscheffsky et Bolyai (pour citer seulement les noms les plus célèbres) ont, comme on sait, démontré que l’axiome des parallèles n’est nullement une conséquence des axiomes restants et que, si l’on fait abstraction de cet