Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/241

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— Monsieur, c’est comme candidate que je me présente devant vous. Je viens vous prier d’agréer ma candidature et de vouloir bien m’inscrire sur les listes de l’Académie… Je vais débuter dans la littérature et j’espère, par mes efforts, arriver à me rendre digne du grand honneur de m’asseoir sous la coupole de l’Institut, non loin de l’illustre journaliste que…

— Prenez un siège, je vous prie, mademoiselle, dit l’académicien qui venait de réussir à rattacher les courroies de son réservoir à air, je suis à vous immédiatement… vous voyez que je suis en train de vérifier le contenu de mes malles… on oublie toujours quelque chose… Je n’emporte que le strict nécessaire, les objets indispensables… revolvers, scaphandres, costume d’incendie, paraballes, parapluie-tente, hélicoptère de voyage, etc. Je vais à Buenos-Ayres pour la huit cent douzième révolution… j’aurais pu prendre le tube maritime pour New-York et gagner la République argentine par les tubes terriens, mais j’ai préféré la voie aérienne ; la révolution n’est annoncée que pour la semaine prochaine, le président m’a téléphoné que j’avais le temps…

— Ah ! monsieur, dit Hélène, j’ai été si souvent troublée en lisant vos articles et vos dépêches, je vois que je puis encore me préparer à de violentes émotions !

— Nous disons donc, reprit Camille Gildas en tirant son carnet, candidate à l’Académie, mademoiselle ?…

— Hélène Colobry…

— Dans quel genre comptez-vous briller ?…

— Je ne sais pas encore, balbutia Hélène embarrassée.

— Bon, cela ne fait rien, je vous inscris… si vous n’avez pas de préférence, je vous conseille le journalisme ; les autres branches de la littérature ont fait leur temps ; la poésie, l’histoire, le roman sont bien usés… pensez-y, mademoiselle.

— Je vous remercie, monsieur, et je vous souhaite un bon voyage. »

L’académicien tendit cordialement la main à la candidate.

« Avez-vous fait toutes vos visites, mademoiselle ; non ? Ne vous donnez donc pas tant de peines, allez cette après-midi à l’Académie, il y a grande séance ; vous trouverez tous mes collègues réunis, vous ferez ainsi vos visites en bloc.

— Encore une fois, merci, monsieur. »

Hélène sortit. La cloche du transatlantique sonnait le départ, les