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— Il n’y a pas d’entr’acte, répondit M. Ponto en consultant le programme ; le rideau va se relever tout de suite pour le 3e clou. Voici le sujet : »

Grand intermède entre le 2e et le 3e acte
Le combat des Horaces et des Curiaces
Pantomime dramatique équestre et pédestre par les Crokson
et les mimes de Chicago.

L’orchestre du Théâtre-Français entamant une nouvelle marche guerrière, annonça le lever du rideau. Le décor était changé ; la scène représentait maintenant un site près de Rome, avec une exactitude d’autant plus complète que le décor était tout simplement une photochromie sur toile, agrandie par un procédé nouveau. Tous les touristes pouvaient reconnaître l’endroit ; avec une bonne lorgnette on distinguait sur la gauche des poteaux télégraphiques, que les décorateurs avaient, pour éviter un anachronisme trop brutal, déguisés en peupliers.

Les Crokson, déguisés en guerriers romains, firent leur entrée à cheval et commencèrent immédiatement à simuler un combat à la lance. Après quelques brillantes passes d’armes, ils jetèrent leur lance et sautèrent par-dessus leurs chevaux pour reprendre la lutte avec le glaive seul. Les épées tourbillonnaient et s’abattaient sur les boucliers et sur les casques avec une violence propre à jeter l’effroi dans le cœur des spectatrices. Deux des Horaces tombèrent ; le troisième Horace, suivant la tradition, prit sa course pour éviter d’être attaqué par les trois Curiaces réunis.

Les mimes de Chicago, groupés dans le fond comme le chœur antique, mimèrent avec une verve dramatique le fameux :

Que vouliez-vous qu’il fît contre trois ? — Qu’il mourût !

Enfin le dernier des Horaces abattit successivement ses trois ennemis. La partie dramatique était terminée ; la pantomime prit un cours plus drôlatique : les Horaces et les Curiaces, ressuscites, entreprirent une lutte comique entremêlée de sauts périlleux, de culbutes et de contorsions du plus réjouissant effet. Le dernier des Horaces, poursuivi par toute la bande des Curiaces, sautait par-dessus leurs têtes et disparaissait dans le trou du souffleur, reparaissait à l’orchestre, et enfin, après avoir mis tous ses ennemis en capilotade, s’enlevait dans les frises par une corde à nœuds.