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L’ÂME DES BONS


 
L’âme des bons, fragile et douce étrangement,
Ne peut pas croire à des trahisons incessantes
Et qu’il faille toujours douter des voix absentes
Et voir sur toute lèvre un silence qui ment.

Les bons, ceux qui n’ont pas la science de vivre,
Pauvres âmes, en qui le moindre mot aimant
Résonne en frissons d’or et tinte longuement
Ainsi qu’un humble aumône au fond d’un tronc de cuivre

Les bons, ceux qu’un navire en allé, tout là-bas
Au bout de l’océan, le soir, mélancolise ;
Les bons qui, sans croyance, entrent dans une église
Et rient aux amoureux qu’ils ne connaissent pas.