Page:Rodenbach - La Mer élégante, 1881.djvu/134

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Plus je m’envolerais dans les sphères lointaines,
Plus le ciel serait bleu, plus le vent serait doux ;
Les roses n’auraient plus d’épines ; les fontaines
Plus de vase ; et le fond des grands bois plus de loups.

On y vivrait ainsi qu’au paradis terrestre
Ne mangeant que des fruits et dormant dans les fleurs ;
Les oiseaux chanteraient comme un céleste orchestre,
Et les enfants naîtraient sans tragiques douleurs.

Puis ayant traversé cette flotte d’étoiles
Qu’on voit pendant la nuit s’avancer lentement
Dans l’océan du ciel comme de blanches voiles,
J’atteindrais le dernier soleil du firmament,

Pour y trouver enfin dans la vie immortelle
La femme que j’aimais et qui m’aimait jadis,
Et, séparé de tous, vivre seul auprès d’elle :
Ce serait tout mon ciel et tout mon paradis !