Page:Rodenbach - La Mer élégante, 1881.djvu/73

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L’équipe de V’lan rame avec courage
Mais bientôt Nana par un tour savant
Gagne deux longueurs au dernier virage
Et se place en tête avec Vol-au-vent.

À chaque secousse on entend l’eau pure
Frissonner sous eux en faisant des ronds ;
Elle se suspend comme une guipure
Sur les bords vernis de leurs avirons.

Mais voici le but : Vol-au-vent y touche !…
Hourra ! Vol-au-vent ! Hourra ! les rameurs !
Un cri triomphal sort de chaque bouche,
Et l’air retentit d’immenses clameurs.

Allons ! canotiers ! vivent les ivresses !
On n’a pas souvent des triomphes tels.
Vous irez ce soir avec vos maîtresses
Vainqueurs et vaincus, — remplir les hôtels.

Soyez folichons ! battez la campagne !
Car les hommes forts ne sont pas songeurs,
Et vous aimez mieux sabler du Champagne
Que voir le couchant aux sombres rougeurs.