Page:Rodenbach - La Mer élégante, 1881.djvu/77

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Comme le temple est plein, la porte est large ouverte
Et là, parmi les morts couchés dans l’herbe verte,
Et dont les croix de bois semblent des bras levés,
Rêvent d’autres vivants séduits et captivés
Par la sainte douceur des pompes catholiques.

Soudain l’orgue se tait : les voix mélancoliques
Des enfants du lutrin ont suspendu leur vol ;
Et tous sont maintenant à genoux sur le sol
Les yeux mouillés, le cœur ouvert et l’âme en joie,
À regarder au loin sur l’autel qui flamboye
Le prêtre, couronné de ses longs cheveux blancs,
Qui soulève l’hostie entre ses doigts tremblants !…

Vieille Religion ! on vous raille ; qu’importe !
On va criant de vous : Elle meurt ! elle est morte !
Mais moi je le sais bien qu’on vous vénère encor,
Que c’est dans votre antique et merveilleux décor
Que se comprend le mieux la comédie humaine ;
Je sais que malgré tout c’est à vous qu’on amène
Les berceaux des enfants et les cercueils des morts ;
Je sais qu’en vous quittant on trouve le remords ;