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Page:Rolland - Beethoven, 2.djvu/45

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GŒTHE ET BEETHOVEN

Elle est tellement « possédée » de Beethoven que Beethoven a passé en elle, avec sa terrible solitude : elle la fait sienne, ce désert la brûle. Et elle se réfugie dans la lumière, dans la tendresse paternelle de Gœthe. Tout le début de cette lettre à Gœthe) dans le Briefwechsel de 1835 (serait à étudier pour les psychanalystes). Il y a là un phénomène « médiumique » saisissant. Bettine était une âme qui boit les ondes électriques[1] des âmes chargées de génie. Or, elle avait la chance de surprendre Beethoven, en pleine crise de passion et de transe créatrice (de « raptus », comme il dira le lendemain, lorsqu’elle lui rappellera les paroles prononcées)[2].

L’entretien se prolonge : car Beethoven, séduit, ne lâche plus Bettine, l’accompagne à la maison des Brentano, l’entraîne en promenades ; et Bettine, fascinée, continue d’oublier tout pour lui : « la société, les galeries, les théâtres, et jusqu’à la tour Saint-Stephan ! »... Il se dit entre eux encore de grandes choses, — que plus tard, Schindler a mises en doute, pour la raison naïve que jamais Beethoven ne lui en avait parlé. Mais Schindler

1. Le mot d’« électricité » revient, à maintes reprises, dans son entretien avec Beethoven.

2. Je ne veux pas reproduire ici l’entretien magnifique. Il demande une étude à part et une critique attentive. Ce sont des éclairs de génie, dans un brouillard de rêves mystiques, déchaînés en Bettine par le voyant solitaire qu’elle avait inlerrompu en pleine création. Je m’en tiens aux faits les plus certains.

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